Mise en garde de la Société civile contre le un processus électoral piégé

24 heures après le dépôt de la candidature d’Emmanuel Shadary à la Commission
Electorale Nationale  Indépendante, pour le compte du Front Commun
pour le Congo (FCC), la Société civile de la RDC  (SC-RDC) a tenu un
point de presse hier jeudi 9 août 2018 au siège du « SYNECAT », situé
dans la commune de Kalamu.
Son objectif était d’évaluer le processus électoral en RDC, à la
lumière de l’Accord de la Saint-Sylvestre.
En substance son le Coordonnateur, Christopher Ngoyi a tiré la
sonnette d’alarme en dénonçant en amont le processus électoral  piégé
intentionnellement susceptible d’amener  le pays dans des
contestations post-électorales.  Il a rappelé que le dauphin désigné
n’est nullement un cadeau du Chef de l’Etat, mais constitue une
victoire arrachée par le peuple congolais qui avait barré la route au
référendum initié par la majorité présidentielle en janvier 2015.
Jr Ekofo

        La rencontre de ce jour est placée sous le thème de l’évaluation du
processus électoral en RDC, à la lumière de l’Accord de la St
Sylvestre qui, en son chapitre IV, en a balisé le format, avec
l’objectif de réaliser la toute première alternance politique par la
voie des urnes suite à l’organisation des élections voulues crédibles,
transparentes et apaisées, au terme d’une transition gérée de manière
consensuelle par toutes les parties prenantes.
        Malheureusement, la SC-RDC a le regret de constater que loin d’être
une affaire de tous, par tous et pour tous, le processus électoral est
à ce jour confisqué et piégé par une seule famille politique,
l’ex-majorité présidentielle recomposée en l’occurrence en FCC, après
avoir détricoté les termes essentiels de l’Accord susvisé pour mieux
le vider de sa substance.
Guère étonnant !
        Le piège remonte loin et s’inscrit dans la logique de stratégies de
longue date contre lesquelles la SC-RDC s’est constamment insurgée, le
plus souvent au péril de la vie de ses membres.
        Pour rappel, la détermination avec laquelle elle a farouchement
combattu la tentative de glissement de l’actuel pouvoir au-delà du 20
décembre 2016 au cours des « Glorieuses journées » des 19, 20 et 21
janvier 2015.
        Ce qui, outre la mort de centaines de compatriotes, a valu
l’emprisonnement du Coordonnateur Général de la SC-RDC et de
quelques-uns de ses collaborateurs, obligeant d’autres à aller en
exil.
        Autre point de discorde, la conduite du processus électoral
proprement dit, de la création de la CEI à la CENI dans sa forme
actuelle.
        En effet, pour la SC-RDC, la composition de l’exécutif de la centrale
électorale étant l’affaire exclusive des politiciens, le
fonctionnement de la CENI ne lui permet pas de garantir l’impartialité
et l’objectivité de ses actions.
        C’est pourquoi, la SC-RDC a toujours réclamé la restructuration de la
CENI, combat mené en leur temps respectivement contre le Pasteur NGOY
MULUNDA, l’Abbé MALU-MALU et aujourd’hui, contre NAANGA Corneille dont
le départ est vivement souhaité.
        Aussi, la SC-RDC se félicite de ce que la question de la
redynamisation de la CENI ait fait l’objet du chapitre IV, point 7 de
l’Accord de la St Sylvestre qui, hélas n’a pas été respecté.
        Plus globalement, la SC-RDC note à cet effet que le constat du
chapitre IV, point 8 dudit Accord n’a connu aucune avancée
significative.
        Autre constat de faillite, lors des épisodes de la désignation du
Premier Ministre et de celle du Président du Conseil National de Suivi
de l’Accord et du Processus électoral «CNSA» au cours desquels la
volonté de l’opposition/Rassemblement a été contournée; ce qui a
permis la mise en place d’un « Gouvernement d’Union Nationale» aux
ordres ainsi que d’un CNSA amorphe et réduit à l’impuissance pour
corriger les irrégularités relevées, dont les quelques exemples
ci-dessous.
        Concernant le Gouvernement, les mesures de décrispation politique
appliquées de manière sélective, si ce n’est cavalière, sont restées
lettre morte : certains leaders politiques emblématiques continuent à
être exclus du processus électoral, entre autres au moyen d’une
justice instrumentalisée.
        Constat de faillite encore, au chapitre de la sécurisation des
personnes et de leurs biens dont voici quelques exemples cités
ci-après de façon non exhaustive.
– cas de KAMUINA NSAPU, des victimes de massacres à BENI, BUTEMBO,
BUNIA et, de manière générale, des populations congolaises en proie
aux exactions de toutes sortes de la part de milices ou groupes armés,
voire des forces de l’ordre ;
– Répressions des manifestations publiques, fin 2017 – premier
semestre 2018, organisées par les mouvements (CLC, LUCHA, FILIMBI,
ECCHA, etc…) dont le seul tort était d’exiger l’application
intégrale de l’Accord de la St Sylvestre ;
– Partition de certains partis politiques de l’Opposition par la prise
d’arrêtés ministériels, en violation de la loi sur les partis
politiques – Instrumentalisation de la justice et exclusion du
processus électoral  de quelques figures emblématiques de l’opposition
;
        Par ailleurs, que conclure de la dernière mise en place unilatérale
des autorités de la territoriale aux couleurs de l’ex-majorité
présidentielle ? Ou encore, de la confiscation des media publics au
service exclusif de la famille politique précitée rendant, ainsi ardu,
leur accès aux autres opérateurs politiques et sociaux ?
        Le malaise se trouve accentué à l’analyse du comportement des
dirigeants de la CENI, aux ordres de la plateforme électorale FCC dont
la neutralité est sujette à caution du fait des actes ci-dessous :
– Constitution d’un fichier électoral entaché d’irrégularités
multiples dont des millions de doublons et d’électeurs enrôlés avec
carte délivrée sans empreinte digitale ;
– Opacité dans la gestion des ressources tant humaines que matérielles ;
 – Refus par la CENI d’autoriser un audit externe de la centrale électorale;
– Volonté affirmée d’imposer la machine à voter malgré l’absence de
consensus à ce sujet des parties prenantes ;
– Comportement partial et vexatoire de la CENI à l’endroit des autres
parties prenantes ;
– La mise à l’écart du processus électoral de la diaspora congolaise,
en violation du droit constitutionnel reconnu à tout Congolais de
choisir librement ses dirigeants, etc.
        Quant au Parlement, il continue à voter des lois, selon la logique de
la conservation du pouvoir par les tenants actuels, comme ce fut le
cas lors du vote de la loi électorale, spécialement en ses points
fixant aux candidats une caution élevée et discriminatoire,
établissant de fait une astucieuse démocratie censitaire déguisée, où
le pouvoir des forces de l’argent conditionnerait l’accès au pouvoir
politique.
De ce qui précède, la SC-RDC a par conséquent la nette conviction que
le processus électoral est piégé intentionnellement.
        C’est pourquoi, la SC-RDC tire la sonnette d’alarme afin de remédier
à ces multiples irrégularités qui, si elles persistent, susciteraient
à coup sûr la méfiance d’une frange non négligeable de la population à
l’encontre des résultats des scrutins à venir, mettant ainsi en péril
la cohésion nationale et ruinant du même coup l’espoir de mettre fin à
la crise de  légitimité, née à l’issue des élections de 2011, par la
tenue des élections crédibles, transparentes et apaisées au terme d’un
processus électoral inclusif et consensuel, tel que repris par
l’Accord de la St Sylvestre.
        Ce qui, comme dit ci-haut, est loin d’être le cas au jour d’aujourd’hui.
        Bien au contraire, la tension va grandissante avec énorme risque de
déstabilisation non seulement de la RDC mais aussi des pays de la
Sous-région des Grands Lacs, ruinant ainsi tout espoir de paix
durable.
        Raison majeure qui a motivé la SC-RDC à ne point prendre part à’ la
parodie d’élection «Made in Corneille NAANGA» qui risque très
prochainement, si rien n’est fait, d’allumer un feu difficile à
maitriser car à l’allure où vont les choses, il est évident que les
objectifs d’alternance politique ne seront pas atteints; position en
outre motivée du fait’ que l’Accord de la St Sylvestre 2016 a été
coulé sous la forme juridique de la Résolution 2409 des Nations Unies,
soit en loi internationale opposable à tous pays, y compris à la RDC
membre à part entière de la communauté internationale.
        Pour rappel, la Résolution 2409 est, durant la délicate période de
transition que connait le pays :
-L’unique source de légitimité des institutions politiques à caractère électif;
– Le seul gage de la tenue des élections libres, transparentes et apaisées ;
– La voie obligée et incontournable pour le passage du régime de «
l’homme fort» à celui des institutions fortes dans le contexte d’un
véritable Etat de droit.
        Aussi, la SC-RDC dit :
– Non à la tenue des élections au terme d’un processus électoral vicié
et piégé tel qu’il se déroule actuellement ;
– Non à la machine à voter; Non à la confiscation des mass-médias par
une seule famille politique;
– Non à l’instrumentalisation de la justice pour écarter d’éventuels
rivaux politiques;
– Non à l’insécurité généralisée sur l’ensemble du territoire national
et à la manipulation ethnique pour se maintenir au pouvoir.
        Le fait que Monsieur KABILA ait finalement désigné un dauphin n’est
pas un cadeau fait à la nation et ce seul acte ne peut non plus
détendre l’atmosphère tant que les préalables cités ci-haut ne seront
pas satisfaits.
         Dans la foulée, la SC-RDC dit:
– Oui à la tenue des élections crédibles, transparentes et apaisées ;
– Oui à la restructuration organique de la CENI pour mieux garantir
l’impartialité de cette dernière ;
– Oui à la gestion consensuelle du processus électoral
 – Oui à l’audit externe de la CENI ; -Et de manière globale, Oui à
l’application intégrale de la Résolution 2409 des Nations Unies et de
l’Accord de la St Sylvestre 2016, seules dispositions susceptibles de
restaurer .l’ordre constitutionnel.

En outre, la SC-RDC demande
– Au peuple congolais de rester vigilant et de ne pas se laisser
distraire mais au contraire, de maintenir les pressions pour
sauvegarder le processus électoral ;
– A la communauté internationale, de veiller à la stricte application
de la Résolution 2409, de relever toutes les violations afin d’établir
les responsabilités des uns et des autres et de tirer les conséquences
qui s’imposent ;
– A tous enfin, de se mobiliser pour une transition sans Monsieur
KABILA (TSK) qui n’est plus à négocier tant qu’une recommandation.
La transition sans KABILA n’est plus à négocier aussi longtemps que :
1. La machine à voter n’est pas rejetée
2. Il y a doublons dans le fichier électoral
3. Il y a 10 millions d’électeurs sans empreintes digitales
4. La décrispation politique n’est pas effective.
Le fait que KABlLA ne se représentera pas aux prochaines élections ne
signifie pas qu’il a respecté l’Accord de la Saint Sylvestre loin de
là car les préalables tels qu’ils sont définis et présentés, il en
reste d’autres aussi importants, il s’agit donc d’appliquer l’Accord
dans sa globalité et non partiellement.
Telle est la position à laquelle la SC-RDC reste attachée et tient à
coeur de partager avec le plus grand nombre.


Pour la SC-RDC

Jean Bosco-Puna
Secrétaire Permanent

Christophe Ngoyi Mutamba

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