RDC : le soutien de Gizenga au dauphin de Kabila crée des remous dans son parti

Par  /Jeune Afrique

Moins d’une semaine après la déclaration du patriarche Antoine Gizenga appelant ses partisans à soutenir la candidature d’Emmanuel Ramazani Shadary, certains cadres du Parti Lumumbiste unifié (Palu) renâclent à s’aligner, tandis que des alliés prennent leur distance.

C’est un ralliement qui ressemble à une abdication. Après avoir tenté de se représenter à la présidentielle, Antoine Gizenga, candidat déclaré finalement « inéligible », appelle à voter pour Emmanuel Ramazani Shadary, le dauphin du président sortant. C’est en tout cas ce qu’a fait savoir samedi 20 octobre son fils Lugi Gizenga, secrétaire permanent du Parti Lumumbiste unifié (Palu). Le même fils qui, il y a quelques mois, s’était rapproché de certains partis d’opposition avant d’être suspendu de ses fonctions au sein du Palu.

 Aujourd’hui réhabilité, Lugi Gizenga ne joue plus les rebelles, et se range derrière le candidat du Front commun pour le Congo (FCC), la large plateforme électorale initiée par Joseph Kabila. Mais, déçus par cette volte-face de leur direction, certains élus de formation politique d’Antoine Gizenga, aujourd’hui âgé de 93 ans, se montrent réticents à suivre cette ligne. Et il semble douteux qu’ils battent campagne pour Emmanuel Ramazani Shadary.

Victoire du camp Kabwelulu

« Nous ne l’avons pas fait pour Joseph Kabila en 2011. Attendons voir : les élections sont prévues dans deux mois », grimace déjà un député Palu. À l’en croire, ce revirement de son parti ne serait que l’aboutissement du combat en interne mené contre l’ancien Premier ministre Adolphe Muzito, candidat déclaré lui aussi « inéligible » pour la présidentielle à venir en RDC. Ce dernier ne cachait plus sa volonté d’éloigner son parti du régime en place à Kinshasa. Sans succès. Il a été mis hors-jeu.

Eddy Isango/AP/SIPA

LA BASE MILITANTE DU PALU NE SUIVRA PAS LA DÉCISION DE LA HIÉRARCHIE

Au sein du Palu se livrait, ces derniers mois, une véritable guerre d’influences entre les principaux lieutenants d’Antoine Gizenga. Enjeu principal : s’imposer comme le courant du parti qui contrôle le patriarche, affaibli certes par le poids de l’âge mais toujours aussi populaire dans une partie de l’ouest du pays. Visiblement, c’est la ligne défendue par Martin Kabwelulu, l’indéboulonnable ministre des Mines, qui l’a emporté. Le Palu reste ainsi allié de Kabila et soutiendra, officiellement, la candidature de Ramazani Shadary.

« C’est une honte pour le pays ! » déplore Adolphe Muzito, depuis l’Afrique du Sud où il séjourne. Cet ancien Premier ministre, fraîchement éjecté de son poste de secrétaire permanent adjoint du Palu en charge des questions électorales, regrette que « les gens ne [veuillent] même pas sauver la forme ». Car, avance-t-il, « Emmanuel Ramazani Shadary n’a jamais été investi ni par son parti ni par la coalition ».

« Ramazani Shadary va se contenter de porter un programme – s’il en existe bien un – qui lui aura été imposé par Kabila. Sinon, où est son projet de société alternatif ? » interroge Muzito qui s’empresse aussitôt à rappeler que « tout ceci ne [le] concerne pas ». Et, « de toutes les façons, la base militante du Palu ne suivra pas la décision de la hiérarchie », conclut-il.

Des alliés du Palu pas concernés

Le revirement in extremis du Palu met également mal à l’aise ses alliés. « Nous n’avons pas été consultés. Cette décision ne concerne donc pas le regroupement politique Palu et alliés », fait remarquer le député Henri-Thomas Lokondo, l’un des vice-présidents de la plateforme électorale. Mais, en vertu de l’ « autonomie » dont jouit chaque formation politique membre, « le Palu a agi en tant que parti et c’est son droit », estime l’élu de Mbandaka, dans l’ouest de la RDC.

Pour les alliés du Palu, il n’est pas question pour autant de s’aligner coûte que coûte. « Nous avons décidé de nous accorder du temps avant d’indiquer le candidat que nous allons soutenir », précise Henri-Thomas Lokondo, dont les récentes prises de position à l’hémicycle ou devant les médias n’ont pas été tendres, ces derniers mois, envers le pouvoir de Kinshasa.

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