COVID-19 en RDC: Du test à la prise en charge, un conseiller de Félix Tshisekedi raconte son expérience

Ph/actualite.cd

Vidiye Tshimanga, conseiller spécial de Félix Tshisekedi sur les questions stratégiques, et président du parti politique Congo Dynamique Uni (DCU), est sous traitement à base de chloroquine, après qu’il a été testé positif au coronavirus. C’est lui même qui avait annoncé la nouvelle sur sa page Facebook. Il est la seule personnalité touchée par le COVID-19 qui profite de son état actuel pour sensibiliser la population. Ce mercredi 1er avril, dans un récit chronologique, il explique comment il a été pris en charge jusque là.

Patient COVID-19 positif : ​

Il me semble nécessaire qu’au regard de ma sortie récente, je puisse raconter mon histoire. Je le fais avec l’espoir qu’elle puisse aider nos compatriotes, à comprendre les enjeux de cette maladie ainsi que ses conséquences si une communication adéquate n’est pas mise en place à temps.

Chronologie d’une surprise peu agréable

Dimanche 15 mars 2020

Le dimanche 15 mars, je suis attaqué par un rhume, une toux et des sueurs froides. Les deux jours qui suivront, je me sentirai faible et ayant des douleurs à la tête ainsi qu’aux articulations.

Lundi 16 mars 2020

Je me rends à une réunion le lundi 16 mars, à laquelle j’échange avec Jacques Ilunga et d’autres collègues. Vu que, ce jour la, quelques cas de covid-19 avaient été reportés à kinshasa, nous avons tous pris les dispositions du respect des consignes en terme de distanciation sociale pour ne pas trop nous exposer les uns aux autres.

Mardi 17 mars 2020

Le mardi 17 mars (J-1), par acquis de conscience, je prends contact avec l’INRB afin de me faire tester ainsi que les membres de ma famille.

Jeudi 19 mars 2020

L’équipe des épidémiologistes de l’INRB vient a mon domicile le jeudi 19 mars (J-3) et procède pour toute la famille aux prélèvements sanguins, buccaux et nasaux.

Vendredi 20 mars 2020

Le vendredi 20 mars (J-4), je reçois l’information selon laquelle, mon ami et collègue a fait un malaise cardiaque et est admis à l’hôpital HJ à Limete

Dimanche 22 mars 2020

Le dimanche 22 mars (J-6), je reçois un appel téléphonique de l’épidémiologiste qui me rassure que tous nos tests sont négatifs et qu’il viendra me les remettre en main propre le lendemain, le lundi 23 mars.

Lundi 23 mars 2020

C’est le lundi 23 mars (J-7), dans l’après-midi aux environs de 15h30 que l’épidémiologiste répondra à mon questionnement sur ce silence en disant que faute de véhicule, il était dans l’incapacité de venir me rejoindre a mon domicile afin de me remettre les documents contenant les résultats des tests. Enfin, il a réussi et moi, je n’avais pas eu de choix que d’attendre vu les consignes de confinement. C’est moi-même, en lisant les résultats qu’il me remet en main propre, qui remarque que mes résultats sont positifs contrairement à ce qui m’avait été dit par téléphone. A la lumiere de cette information, ma mise en quarantaine est décidée ​ipso facto​ et mon dossier transmis à l’équipe de « prise en charge » des malades atteints du CoVid-19.

Mercredi 25 mars 2020

Pendant 48h, donc jusqu’au mercredi 25 mars (J-9), je n’ai aucune nouvelle de l’équipe de prise en charge. J’appelle à nouveau de ma propre initiative les numéros qui m ont été remis. C’est ce même mercredi à 22 h 30 finalement que le médecin en charge vient me visiter pour auscultation, prise de tension, saturation d’oxygène dans les poumons ainsi que la température.

Les paramètres étant rassurants, il me prescrit le protocole adopté par l’équipe de riposte, à savoir la Chloroquine et le Zithromax. Compte tenu du fait que mon cas ne semblait pas présenter de signes de complications ainsi que le temps déjà écoulé, mon isolement sera maintenu à mon domicile comme c’est le cas pour d’autres malades dont l’état ne nécessite pas impérativement l’hospitalisation. Cette mesure a pour but de maintenir la disponibilité des places sur les sites hospitaliers afin d’optimiser les chances de succès d’une prise en charge rapide des patients dont les cas présentent de vraies complications.

Vendredi 27 mars 2020

Ce n’est finalement que le vendredi 27 mars (J-11), à 21:30 que je reçois la cure de chloroquine et le zithromax. Cauchemar du récit de la perte d’un ami. Le même vendredi j’apprends avec stupeur que mon collègue est décédé. On m’apprend ce jour là que, pendant sa semaine de souffrance, il a été ballotté de l’hôpital ​HJ ​à celui du cinquantenaire, puis à Ngaliema . C’est le jeudi soir qu il sera transféré dans un véhicule sans respirateur au CMK.​

Malheureusement, la situation est irrécupérable, vu l’état de détérioration de ses poumons. mon collègue et ami rendra l’âme le lendemain. On m’informe que l’une des causes du décès de mon ami et frère était que les équipes médicales sous-informées et craintives de la maladie COVID-19, ne se sont quasiment pas occupées de lui, ne lui donnant pas les soins adéquats. D’autres cas de décès de malades mal pris en charge m’ont été relatés.

Samedi 28 mars 2020

C’est ainsi qu’après toutes ces péripéties, je décide le samedi 28 mars (J-12), de rendre public mon diagnostic. Cette décision , j’ose espérer, permettra à nos concitoyens de prendre la mesure du risque que représente cette maladie. L’autre aspect de cette décision a pour dessein de démystifier et éviter que la peur et la psychose ne prennent le dessus sur la prévention, la prise en charge et le contrôle. Le même samedi 28 mars, une connaissance qui passait sa quarantaine aussi à son domicile est acheminée à l’hôpital CMK où on lui diagnostique après scanners, des lésions pulmonaires et il y est mis sous respirateur.

Dimanche 29 mars 2020

Le dimanche 29 (J-13), je n’ai plus vu l’équipe de suivi débordée par le volume de travail. Je demande alors à mon médecin de prendre les dispositions nécessaires afin de faire les scanners de mes poumons. Vu que cette maladie sournoise n’est curable que lorsque l’on s’y prend à temps pour la contrer, je suis satisfait de ma décision malgré tout ce que cette pandémie peut amener comme questionnement, quand on est un patient testé positif. Le CMK nous informe qu’ils ne font pas de scanners le dimanche sauf pour les urgences, mais que nous pouvons nous y rendre le lundi 30 (J-14).

Lundi 30 mars 2020

A 10:00 le lundi, l’ambulance vient me prendre à mon domicile et m’emmène à l’hôpital CMK. Arrivé au CMK, une responsable en panique, nous éconduit en clamant qu’elle me connaît et que le CMK refuse les cas atteints du COVId-19. L’ambulance m’emmène ensuite à l’hôpital HJ à Limete où les dispositions ont été prises afin de me faire passer ces fameux scanners. A l’HJ, en moins de 20 minutes, tout était fait. Dès le 2eme jour de prise de la cure de chloroquine couplée au zithromax, mes essoufflements ont disparu et je me sens de mieux en mieux.

Mardi 31 mars 2020

Aujourd’hui, mardi 31 mars 2020 (J-15), soit 13 jours après avoir été testé positif au COVID-19 et au 4ème jour de ma médication, je présente tous les signes d’un bon rétablissement. COVID-19, prévenir ou laisser mourir? J’entends et je lis beaucoup de choses sur mon cas ainsi que sur d’autres. J’ai appris dernièrement que des familles sont pointées du doigt parce qu’il y aurait des personnes atteintes de ce virus chez elles. J’ ai, moi même, vécu l’expérience de mes collaborateurs, chauffeurs et relations, qui sont stigmatisés et même menacés dans certains cas. C’est le manque d’information qui entraîne ce genre de psychose et de panique . ​ C’est ce même manque d’information ​qui entraîne que le corps médical, sous-informé et certainement sous-équipé, n’arrive pas à répondre avec sérénité à cette crise qui, selon toute vraisemblance, prendra encore de l’ampleur. Nous ne devons pas craindre ce virus qui ne tue que moins de 5% de ses malades, mais en revanche, nous devons nous en préserver au maximum par des gestes simples, tel que tous ceux qui sont annoncés par le ministère de la santé ​en collaboration avec l’OMS. Mon récit n’a pas pour objet de jeter la pierre au système de santé de la RDC, ni même aux institutions qui ne tarissent pas d’efforts afin de répondre avec résultats à cette pandémie,​ ni d’ouvrir les hostilités​ ​avec qui que ce soit​. ​

Toutefois,​ je tiens fermement à tirer la sonnette d’alarme afin que les mesures d’information soient prises et que chacun de vous se fasse le relai de ce combat. Le taux de pénétration de l’Internet et des médias est très faible, même dans une ville comme kinshasa. ​

Je vous invite donc en tant que citoyens, à vous mobiliser afin de véhiculer la bonne information. Certains hôpitaux refusent de participer à la lutte contre ce fléau, souvent de peur de faire fuir sa clientèle. Cela est contraire au serment d’Hypocrate et ne pourra que contribuer à creuser un fossé entre les populations. Je sais pertinemment bien que je suis un privilégié vu mon statut et mon parcours. ​Il est tout aussi vrai et connu,​ que les hommes ont tendance à profiter des événements graves pour déstabiliser ou tirer des avantages​ de la situation et alimenter des agendas​ politiques. Dans le cas présent, à mon humble avis, il est temps que tous les Congolais tournent leur regard sans agenda caché, en faisant front commun au Covid-19 via l’unité et la cohésion.

A cet effet, certains présidents étrangers, dans des pays bien mieux préparés que le nôtre,parlent d’une guerre contre ce virus. Il est connu que, lorsqu’une nation va en guerre, il n y a plus de tribus, plus de différences, plus de partis. Nous devons être UN face à l’adversaire.

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