RDC: Félix Tshisekedi remporte le premier round à l’Assemblée nationale

RFI

Jeanine Mabunda, présidente de l'Assemblée nationale congolaise, en novembre 2019.
Jeanine Mabunda, présidente de l’Assemblée nationale congolaise, en novembre 2019. ©JUNIOR D. KANNAH/AFP

Jeanine Mabunda n’est plus présidente de l’Assemblée nationale en République démocratique du Congo (RDC), test réussi par le camp du président Félix Tshisekedi et l’opposition qui étaient jusqu’ici pourtant officiellement minoritaires au Parlement. A l’issue d’une longue journée de débats les députés pétitionnaires ont évincé du perchoir la première femme élue présidente de l’Assemblée nationale dans le pays et 5 autres membres du bureau, ouvrant la voie à une requalification de la majorité, telle que voulue par Tshisekedi.

Avec nos correspondants à KinshasaPatient Ligodi et Pascal Mulegwa

Pas question de voir les affrontements de ces derniers jours se dérouler, des centaines de policiers et quelques soldats ont été mis à contribution pour s’assurer que seuls les députés et la presse accréditée soient présents au Palais du peuple. Toute la journée, les militants de l’UDPS ont été maintenus à distance parfois même à l’aide de gaz lacrymogène, ce qui ne les a pas empêché de chanter l’hymne du parti.

À l’intérieur, le FCC de Joseph Kabila a longtemps cru pouvoir tenir bon. Même ses caciques comme Néhémie Mwilanya étaient présents et ont été jusqu’à réclamer un vote par appel nominal et à bulletin secret. Jeanine Mabunda, une figure du PPRD, le parti fondé par Kabila, avait fait le déplacement au Palais du peuple et avec ses autres collègues du bureau, elle a présenté leurs moyens de défense pour tenter d’inverser la dynamique.

Au final, après de longues heures d’attente, Jeanine Mabunda et ses collègues ont été destitués. Joseph Kabila perd une bataille importante. Ce qui donne raison à Félix Tshisekedi qui affirmait que la majorité d’alors s’est effritée. Le député UDPS Paul Tshilumbu est satisfait et répond à ceux qui disent que l’argent a circulé :

C’est le maître corrupteur qui crie à la corruption. Dans ce pays, nous savons comment le système Kabila a fonctionné : la corruption, les intimidations, les violations des droits de l’homme […) Tous, nous sommes conscients de la misère de notre peuple et nous nous sommes dits que cette occasion nous ne pouvions pas la rater parce qu’elle est très importante pour la relation de notre pays.

Paul Tshilumbu

À l’extérieur du Palais, les militants pro-Tshisekedi ont alors laissé exploser leur joie : « Nous sommes contents parce que le peuple a gagné. Mabunda n’est plus. Cette Assemblée qui travaillait au détriment du peuple congolais ». « Et aujourd’hui, le peuple a démontré qu’il est capable de se prendre en charge à travers les députés. Ils ont sauvé la nation ». « C’est une fête pour la République. On croyait que comme le FCC, on devait voter en sa faveur, mais les députés ont montré vraiment qu’ils travaillent pour l’intérêt commun de la population ».

Le camp Kabila divisé ?

La détresse a pris le dessus dans le camp Kabila. Sur les réseaux sociaux, des nombreuses personnalités de cette famille politique se sont emportées en appelant à des réformes, car les enjeux deviennent stratégiques. Sans l’Assemblée nationale, le prochain à tomber, c’est le Premier ministre et tout son gouvernement, ce qui permettrait au président Félix Tshisekedi d’asseoir son « union sacrée ».

Depuis le déclenchement des tensions au sein de la coalition au pouvoir, de nombreux élus pestent, dans le camp Kabila, contre le fait de ne jamais être associés aux décisions et veulent revoir l’organisation du FCC jusqu’ici cordonné par Nehemie Mwilanya. Entre les élus et leur autorité s’impose dès intermédiaires : les chefs de regroupements politiques. C’est eux qui prennent des décisions à soumettre à la délibération de Joseph Kabila.

Dans ces tensions, le vote d’hier, a expliqué un élu ayant voté contre son propre camp, « est un message clair à l’autorité morale, que sans nous, le FCC est une coquille vide, un lion sans dents ni griffes. Les décisions doivent être prises avec vous, pas sans nous ». Depuis de nombreuses semaines, le camp Kabila dénonce des manœuvres de débauchage de ses élus à coups de billets de banque, même si pour tenter de sauver l’actuel bureau de l’Assemblée national, plusieurs sources au sein du FCC, assuraient que des enveloppes ont été promises aux élus.

On a noté qu’il y a des membres au-delà de ceux de l’opposition qui ont voté contre le bureau. Cela arrive dans des cas spécifiques, c’est un problème interne à l’Assemblée nationale. Mais ce n’est pas suffisant pour décrire ou pour déterminer s’il y a eu ou pas migration de la majorité parlementaire. Ce n’est pas un élément suffisant, parce que plusieurs députés se sont exprimés et ont fait valoir leur perception qu’ils avaient de leur bureau, mais ils n’ont pas manifesté encore une opinion contraire à leur appartenance à leur famille politique.

Patrick Nkanga, rapporteur du bureau politique du PPRD

L’opposant Moïse Katumbi dont la coalition, Ensemble pour le changement, est majoritaire dans l’opposition au Parlement, a salué, jeudi soir, un « vote historique » des députés qui « ont répondu aux attentes de la population et honoré la mémoire de nos martyrs ». « Il n’y a plus d’obstacles pour conduire une politique en faveur de la population et mettre en œuvre les propositions issues des consultations », a -t-il déclaré sur son compte Twitter.

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