Pourquoi Fatshi ne comprend-il pas  »le pourquoi » ?

« Un peuple sans mémoire ne peut pas être un peuple libre » D. MITTERRAND

Il y a plus d’un mois que j’ai rédigé une note sur la non-compréhension du  »pourquoi » de Fatshi ( Les notes de Jean-Pierre Mbelu: Pourquoi Fatshi ne comprend-il pas « le pourquoi » ? – INGETA) J’avais promis d’y revenir avec un article plus détaillé. Je tiens à réaliser cette promesse en reprenant sa phrase : « Je ne comprends pas pourquoi des gens meurtris, affamés, frappés par le chômage et tous genres de calamités chantent à notre gloire alors qu’ils devraient nous exiger plus comme c’est le cas en occident ».

Cette non-compréhension peut être simplement rhétorique. Elle peut exprimer un étonnement.

Si elle est rhétorique, ce que Félix Tshisekedi comprend comment ses compatriotes meurtris, affamés, frappés par le chômage et tous genres de calamités chantent à  »leur louange » tout en faisant comme s’il ne comprenait pas. Dans ce cas, il faudrait étudier pourquoi il fait  »comme si… »

Cette non-compréhension peut être un étonnement ; une véritable incompréhension. Si tel est le cas, il serait souhaitable de questionner le sens, de  »sa lutte », de son engagement historique  » en politique ».

Que serait-il venu faire  »en politique » s’il ne comprenait pas cet appauvrissement anthropologique, cette régression anthropologique de ses compatriotes ?

S’il s’agit d’une véritable incompréhension, il serait important que questionner son enracinement politique au cœurs de ces populations meurtries. Car, il me semble que sans un enracinement sérieux au sein de ces populations, il serait difficile, voire impossible de les comprendre.

Avant d’esquisser mes hypothèses sur toutes ces préoccupations, je tiens à revenir sur les explications de ce  »djalélisme » donné par deux compatriotes.

A travers ses sorties médiatiques, le philosophe kongolais Jean Goubald Kalala pense que ces compatriotes en sont arrivés là à cause de la  »ndombolisation des cerveaux » ; c’est-à-dire à cause de la mise des cerveaux à l’envers ; à cause de l’abrutissement et de  »l’imbécilisation collective » (expression qu’il emprunte à un autre philosophe, M. Kä Mana).

A ses yeux, ses compères artistes musiciens y ont largement contribué. Néanmoins, il ne replace pas cette  »imbécilisation collective » dans le contexte historique où le paradigme de la  »chance eloko pamba » a pu s’imposer (Les Congolais(es) et le paradigme de « chance eloko pamba » – INGETA ).

Son constat devrait être intégré dans une étude historique pouvant expliciter le contexte où est né le processus de  »ndombolisation des cerveaux » tel qu’il est décrit dans l’article ci-dessus.

En fait, ce processus s’intensifie dans un contexte où les dinosaures mobutistes mis au service des  »huissiers du capital » sont les rares Kongolais à disposer de richesses du pays au moment où ses  »huissiers » dictent au pays la ligne économique austéritaire à tenir.

Au cœur de cette dictature imposée par  »les décideurs »,  »le djalelo » et  »la mendicité collective » ont été utilisés comme des armes de destruction massive du  »bomoto » kongolais. (Lire L. DE WITTE, L’ascension de Mobutu. Comment la Belgique et les USA ont installé une dictature, Bruxelles, Investig’Action, 2017)

La ligne économique austéritaire s’inscrivait dans la continuité du  »coup d’Etat permanent » initié par  »les huissiers du capital » et les forces économiques dominantes depuis l’assassinat de Lumumba le 17 janvier 1961. (Lire Banque mondiale : le coup d’État permanent (cadtm.org) )

Relu sous cet angle, le processus de  »ndombolisation des cerveaux » participe de la déstructuration culturelle initiée par  »les petites mains du capital » au cœur de leur guerre contre l’intelligence kongolaise en vue du triomphe de l’hégémonie culturelle anglo-saxonne dominante.

A ce point nommé, qu’est-ce que  »Fatshi béton » ne comprendrait pas ? Il ne comprendrait pas qu’en travaillant avec  »les mêmes décideurs », il participe de cette guerre contre l’intelligence kongolaise en vue de la régression anthropologique qu’il décrie. J’y reviendrai.

En dehors du philosophe Jean Goubald Kalala, Israël Mutombo, le patron de l’émission et de la télévision  »Bosolo na politique » pense que la régression anthropologique que  »Fatshi béton » décrie est le fruit de la  »Wengetisation na politique ».

Sur cette vidéo (BOSOLO NA POLITIK | 17 MARS | PARLONS DEVELOPPEMENT DU CONGO PROFOND !! – YouTube ), vers la fin, s’adressant aux  »politiciens », il leur dit : « Bosali wengetisation na politique. Ba plupart oyo bazo landa bino, bazo landa ba leaders ndenge bazo landa Werra na GB. Soki olobi mabe ya leader na bango, ata ayibaki, ata abomaki, bakoyoka te. Baza même prêts baboma yo. Partout, partout… »

 
 
 

Pour Israël Mutombo,  »les leaders politiques » ont copié le mode de (dys)fonctionnement des musiciens kongolais. Ils ont fanatisé leurs partisans à tel point que ces derniers sont prêts à tuer quiconque dénoncent leurs forfaits et/ou crimes. Ils peuvent être des voleurs ou des assassins, il ne faut surtout pas en parler sous peine d’être sérieusement  »corrigé ».

 »La Wengetisation na politique  » n’est pas tout simplement ce fanatisme aveuglant et mortifère. C’est aussi la mise en pratique de la méthode du  »diviser pour régner », pour devenir  »grand prêtre » (avec tout ce que cela implique).

Donc,  »les leaders politiques  »  »wengetisés » et  »wengetisants » ayant perdu les repères  »bomotoïsants » luttent contre la cohésion nationale et la paix sociale tout en faisant semblant de faire la politique. (Ils ont besoin d’être historiquement, politiquement et culturellement recyclés.)

Comment, un membre de cette  »classe politique »,  »Fatshi béton », n’a-t-il pas compris cette régression anthropologique qu’elle favorise ? Lui qui, un jour, a dit que  »la classe politique kongolaise » se comporte comme  »une mafia » ? (à suivre)

Babanya Kabudi

Génération Lumumba 1961

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