Le Congo-Kinshasa et les questions  que soulève la rencontre de l’île de Gorée

« L’outil le plus puissant que détienne l’oppresseur est la pensée de l’opprimé. » S. BIKO
 
Un bon usage de la liberté d’expression et d’opinion devrait nous permettre de débattre  sans tabou des questions face auxquelles  le Congo-Kinshasa est placé aujourd’hui sans peur des anathèmes. Nous avons le devoir de beaucoup débattre entre nous pour éviter la prise en otage de nos populations par des ‘’malins’’, des vassaux des ‘’maîtres du monde’’ ou des ‘’esclaves volontaires’’. Cet exercice a un prix que plusieurs d’entre nous sont prêts à payer.
 
Une lecture attentive que l’histoire de l’Afrique, de la traite négrière jusqu’à ce jour,  nous indique que l’île de Gorée est, symboliquement ‘’la maison des esclaves’’, ‘’le lieu de passage des esclaves’’  pour ‘’le nouveau monde’’. La rencontre qui y a été organisée  du 12 au 15 décembre 2015  soulève certaines questions. Qui en a été l’initiateur ? Qui l’a financé ? Pour quels objectifs avoués ou inavoués ? Cette ‘’maison de l’esclavage’’ et ‘’de la mort’’ se serait-elle transformée en un lieu où ‘’la vie démocratique’’ va renaître pour certains pays africains  qui y ont été représentés par certains de leurs enfants ? Le proche avenir nous le dira.
En attendant, le recours à certains acteurs étrangers et à certaines fondations pour le financement de cette rencontre  soulève quelques inquiétudes.
Depuis quelques années, plusieurs partis politiques congolais et plusieurs ONG dont les membres ont participé à la rencontre de l’île de Gorée travaillent  avec les agences  de sédition et instruments made in USA. Les partis politiques participant au programme TOMIKOTISA  participent aux conférences et rencontres financées par la NED, le NDI ou l’USAID.  Ces agences ont des liens avec la Fondation Konrad Adenauer ou Open Society de George Soros. Apparemment, ces agences préparent les partis politiques et les ONG  à ‘’la non-violence active’’. Néanmoins, en passant en revue  certaines actions menées sous leur supervision dans certains pays du monde, il apparaît que cette ‘’non-violence’’ est ‘’une stratégie d’action violente et militaire opérationnelle d’ingérence et de mise en déroute de gouvernements’’[1].  Cette ‘’non-violence’’ est au service de ‘’coups d’Etats ‘’doux’’, du maintien des ‘’Etats  faillis’’ dans cet état et de la destruction de la culture locale et nationale.
Elle participe de l’entretien de l’inculture et de l’esclavage volontaire.
Il y a donc lieu de dire que si ce sont les mêmes agences qui accompagnent ces partis politiques et ces ONG dans leur marche vers ‘’la démocratie’’ à Gorée,  nos frères et sœurs y ayant participé peuvent avoir opté pour ‘’un esclavage volontaire’’.  ‘’Mbuji ulela, nkashama muimane’’ ? (La chèvre met bas en présence du léopard ?) Cet ‘’esclavage volontaire’’ pourrait avoir comme conséquence ‘’la déflagration’’ du Congo-Kinshasa dans un proche avenir.  Pourquoi. Expliquons-nous.
Ces agences avouant faire le même travail que la CIA[2]  sont ‘’spécialistes’’ dans l’instrumentalisation des conflits. A l’écoute du discours de Joseph Kabila sur l’état de la nation le lundi passé (le  14 décembre 2016), il y a lieu  de dire  qu’il n’est pas disposé à respecter la fin de son mandat (usurpé).  Le recours à l’article 64  pourra être de mise.
Même s’il a promis dans ce discours que ‘’le sang  et la sueur du peuple ne couleront pas’’, il n’est pas sûr que sa police politique évitera le recours aux balles réelles  pour soumettre les populations  que  ‘’les amis de l’île de Gorée’’ auront réussi à mettre dans la rue en les convaincant que ‘’la liberté s’arrache’’.  Un cas d’impunité de trop pourra être stigmatisé par ‘’la communauté internationale’’. Et « les victimes de l’impunité servent, comme l’admet George Soros, de tremplin à la promotion de l’instabilité politique et à la prise de contrôle des ressources économiques (généralement minières et pétrolières) du pays ciblé. »[3]
Rappelons que ce sont les alliés pléniers ou les acteurs majeurs de la guerre d’agression ayant débuté vers les années 1990 qui financent les Fondations et agences  soutenant ‘’les amis de l’île de Gorée. Leurs objectifs au Congo-Kinshasa n’ont pas changé : ils tiennent à avoir la mainmise sur les ressources stratégiques du Congo-Kinshasa et à contrôler ce pays vu comme  l’un des marchés clés pour l’Afrique. Ils instrumentalisent  certains politicards et membres de la société civile  pour ‘’une réalisation plus ou moins civilisée’’ de leurs objectifs.  Ils théâtralisent la scène  civico-politique congolaise afin que ce business prenne les allures d’une politique démocratique pendant qu’ils sont en train de se fabriquer des ‘’vassaux’’ et des ‘’esclaves  volontaires’’. Ils voudraient, comme avec Mzee Laurent-Désiré Kabila, nous présenter  leurs ‘’vassaux’’ et ‘’esclaves volontaires’’ comme étant des ‘’démocrates’’ et des ‘’libérateurs’’. Non. ‘’Les chasseurs de matières premières’’ n’ont pas besoin de démocratie et des droits de l’homme. Ils estiment que ce sont des idées illusoires. Ils optent régulièrement pour le processus de vassalisation et de soumission des peuples et de leurs dirigeants au dépens de leur souveraineté. Quand Konrad Adenauer est par exemple évoqué, il serait malheureux d’oublier ce que disait les patrons allemands en 2006. Ils disaient ceci : « L’Allemagne doit assurer son acheminement en matières premières stratégiques, au besoin en s’aidant de moyens militaires. C’est qu’a expliqué fin mars (2006), à Berlin, Karl-Heinz Dömer, président de la Task Force allemande chargée des matières premières. »
Avant 2006, les entreprises allemandes ont gagné des sommes astronomiques sur le dos du Congo-Kinshasa au cours de la guerre de 1998 à 2003. Si les Allemands défendaient  ‘’la démocratie  et les droits de l’homme’’, les Grecs en témoigneraient…Il n’y a rien de tout cela. C’est du bluff.
Les alliés pléniers ou les acteurs majeurs de la guerre d’agression contre le Congo-Kinshasa excellent en l’art du changement des ‘’gouverneurs’’ de leurs intérêts. Leurs vassaux et esclaves volontaires sont interchangeables : et cela dans n’importe quel pays où la conscience et  la connaissance de leur mode opératoire ne sont pas encore devenues les choses les mieux partagées.
Pour notre part, face au chaos, à la déflagration en préparation au Congo-Kinshasa, nous renvoyons dos à dos ‘’le clan Kabila’’ et ‘’les amis de l’île de Gorée’’. Pourquoi ? ‘’Le clan Kabila’’ n’est pas sincère comme plusieurs politicards congolais. Il est évident que plusieurs politicards ne sont pas toujours sincères… lorsque les « maîtres du monde  » veulent se débarrasser d’eux, ils deviennent tout d’un coup « nationalistes » et ‘’patriotes’’, mais lorsqu’ils ont besoin d’eux et les placent au ‘’pouvoir’’, il n’existe pas d’ingérence… Tel est le piège à déconstruire. Déconstruire ce piège implique de questionner ‘’les amis de l’île de Gorée’’ sur leurs engagements avec ‘’les maîtres du monde’’  afin d’éviter que le service qu’ils auront à rendre au même système demain ne puissent continuer à prendre nos populations en otage.
Que faire ? Créer nos Task force  pour étudier ‘’l’autre’’, les alliés pléniers ou les acteurs majeurs, nous organiser en conscience et en connaissance de cause pour éviter de tomber dans les pièges des vassaux et autres esclaves volontaires et être prêts à en payer le prix ; organiser nos masses populaires autour des débats sur les enjeux réels pour en faire des masses critiques capables de renverser les rapports de force, de renvoyer dos à dos ‘’le clan Kabila’’ et ‘’les amis de l’île de Gorée’’ et de participer à l’élaboration des normes constitutionalisables pour notre collective émancipation politique.  ‘’Mieux vaut être pauvre mais libre, plutôt que d’être riche et esclave’’.
 
Mbelu Babanya Kabudi


[3] C. ONANA, Menaces sur le Soudan et révélation sur le procureur Ocampo. Al-Bachir & Darfour. La contre-enquête, Paris, Duboiris, 2010, p. 471

 

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