Révélations inédites du député Alexis Mutanda : 55 ans après, la RDC à la recherche d’un leadership responsable

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Député national et élu de la circonscription électorale de MbujiMayi, au Kasaï Oriental sur la liste de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social(UDPS), Alexis Mutanda s’est entretenu, à bâtons rompus, avec la presse sur plusieurs questions d’actualités.

Opérateur économique et fondateur des entreprises de presse La Tempête des Tropiques, Canal Numérique Télévision(CNTV) et Trinitas Fm, l’ingénieur civil Mutanda a passé au peigne fin la situation de la RD Congo et n’a pas manqué de relever les maux qui rongent le pays.Au menu de cet entretien, l’ancien secrétaire général de l’UDPS a fait le point sur les 55 ans de l’indépendance de la RD Congo.

Il a réagi sur les messages de Joseph Kabila et Etienne Tshisekedi, dans le cadre du Dialogue politique en gestation dans le pays, surtout sur la médiation nationale et ou médiation internationale, respectivement voulue par le pouvoir en place ou proposée par une partie de l’opposition politique pour le dialogue, ainsi que le financement des élections et le rapport de l’Amnesty International sur l’Opération « MbatayaBakolo », tenue au Congo/Brazzaville contre les Congolais de Kinshasa.

Haut cadre de l’UDPS, Alexis Mutanda a eu à diriger l’UDPS dans une période la plus difficile dans son histoire, avec une longue absence de son président national Etienne Tshisekedi, à l’époque malade et en séjour médical en Europe. Il a assumé en 2011 les fonctions de coordonnateur du bureau de la Commission électorale permanente (CEP) de l’UDPS.

Ci-dessous l’intégralité de l’entretien avec l’élu de MbujiMayi

Question: la RD Congo a célébré le 30 juin dernier les 55 ans d’anniversaire de son indépendance. Quel bilan faites-vous après toutes ces années d’indépendance?

Alexis Mutanda: Merci beaucoup de votre question. Si nous n’avons pas la mémoire courte, on se rappelle que le peuple congolais avait célébré avec allégresse cette fête de la libération. Nous avons vu les pères de l’indépendance qui venaient de sortir des élections de 1960, après la Table-ronde de Bruxelles, laquelle avait posé les jalons, s’étaient battus pour présenter leurs programmes de société, en particulier le Premier ministre Patrice Emery Lumumba, qui 4 jours après, commençait avoir des problèmes.

Ceux qui n’avaient salué l’indépendance du Congo et certains des fils du pays, en complicitéavec la communauté internationale pour mettre fin à la vie de Lumumba à Lubumbashi dénommée à l’époque Elisabethville. C’est ainsi que cette indépendance s’éloignait de l’Etat de droitsauquel aspire le peuple. En 1965, Mobutu a pris le pouvoir, alors qu’il camouflait ses intentions de dictature.

Durant 32 ans, il a commencé à élaborer une Constitution d’au moins 2 partis politiques, avant de révéler sa vision de tailler sur mesure de cette Constitution, qui va instaurer une dictature avec un parti-Etat.

Le peuple congolais, souverain primaire, s’était dessaisi complètement du pouvoir, que Mobutu utilisait de manière personnelle. Le pays a vécu ainsi une descente aux enfers. Le rêve des Congolais s’effondrait jusqu’à un certain moment où il est sorti d’un Parlement mis en place par Mobutu, des parlementaires qui ne supportaient plus n’import quoi. Il s’agit de 13 parlementaires qui s’étaient opposés à la mauvaise gestion politique du pays.

En 1982, ils vont créer l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), dans des conditions très difficiles. Mobutu, qui disait de son vivant pas deux partis politiques, les a traités de toutes les manières, jusqu’à ce que les gens apprennent que les 13 parlementaires avaient raison.

Mobutu était ainsi contraint d’organiser les consultations populaires en 1989, justement parce qu’à l’époque, il était en désarroi. En 1990, il lance la démocratisation du pays, qui avait permis l’organisation de la Conférence Nationale Souveraine.

Comme en 1960, ce grand forum avait suscité l’espoir dans le cœur des Congolais. On attendait à l’instauration de la vraie démocratie et de l’Etat de droits. Mais Mobutu a commencé à mettre des bâtons dans les roues des résolutions de la Conférence Nationale Souveraine.

C’est ainsi que, les gens ont pris les armes en 1996, un mouvement qui a amené l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo/Zaïre (AFDL) au pouvoir à Kinshasa. L’AFDL a été appuyée par les pays limitrophes comme le Rwanda, l’Ouganda et autres le Burundi.

Une fois de plus, les espoirs de tout le peuple s’étaient effondrés. On a vu les tenants du pouvoir procéder de la même façon que Mobutu. Ce qui a fait que les alliés du pays ont commencé à s’entretuer. On a vu le MLC, soutenu par l’Ouganda, le RCD, par le Rwanda et le gouvernement, avec certains pays comme l’Angola, le Zimbabwe et autres.

La communauté internationale a fait pression pour que les belligérants se rendent à Lusaka, où ils ont signé un accord. Le leader de l’UDPS a même sillonné les pays étrangers pour solliciter leur soutien pour la tenue d’un dialogue organisé à Sun City.

Question: Ce n’était dû à l’impréparation?

Réponse:55 ans après, la RDC devait être réellement un pays démocratique où règne l’état de droit. Le bilan d’aujourd’hui n’est pas nécessairement aussi brillant que celui de 1960. On peut même dire qu’en 1960, il n’yavait pas d’intellectuels comme aujourd’hui.

Il faut alors se poser la question de savoir qu’est-ce que nous faisons avec tout cet appareillage d’intellectuels? Aujourd’hui 55 ans après, on continue à dire que c’est la faute de telle ou telle personne.En 1960, l’enseignement primaire était gratuit. On allait même à l’école sans cahier, tout était donné gratuitement.

Ceux qui étudiaient à l’université avaient bénéficié pour la plupart de bourses, les soins de santé ont été gratuits. En 1960, la jeunesse était mieux encadrée qu’aujourd’hui, il n’y avait pas le chômage comme aujourd’hui! Ce qui manque dans notre pays c’est le leadership responsable de développement. Le pays se porte plus mal qu’hier.

Question:L’anniversaire de l’indépendance était aussi occasion pour le chef de l’Etat de faire un message à la Nation.Quelle est votre réaction par rapport à ce message, surtout le Dialogue en gestation où il s’oppose à l’ingérence de la communauté internationale, dont une partie de l’opposition, notamment l’UDPS, réclame une médiation pendant ce forum politique?

Réponse:En 2001, lorsque Kabila est arrivée au pouvoir, le pays était divisé.Il y avait le RCD, le MLC et le gouvernement de Kinshasa.

Ce n’est pas cette communauté internationale qui a poussé les belligérants à signer l’Accord de Lusaka, pour une transition et confirmé Kabila comme chef de l’Etat. Ce n’est pas cette communauté internationale qu’on vilipende aujourd’hui qui a financé les élections de 2006, dont Kabila a été élu président? Qui a été d’un plus grand soutien à la CENI,dans le cadre de l’appui à l’organisation des élections dans le pays, ce n’est pas la Monusco qui représente la communauté internationale.

Ce n’est pas elle, dont on se moque de lui aujourd’hui, qui a financé en grande partie les élections de 2011? Il ne faut pas que l’on accepte l’aide de la communauté international quand il s’agitdel’intérêt du pouvoir, mais dire que c’est de l’ingérence quand il s’agit de l’intérêt de la population.

Nous attendions quele président,Kabila qui est le garant de la paix et de la Constitution, définisse sa position sur la question de son avenir politique. Moi, je m’attendais que dans son message, qu’il puisse se prononcer sur le problème de troisième mandat comme il l’a fait pour le dialogue.

Question:Nous avons vu le conseiller spécial du chef de l’Etat déposer au Parquet général une dénonciation sur la corruption, détournement des deniers publics et blanchiment des capitaux.Quel est votre point de vue sur cette démarche?

Réponse: C’est une très bonne initiative. C’est comme l’initiative d’aller traquer les FDLR dans l’Est du pays. Voilà des initiatives que tout le monde attend. Mais je crois que le Chef de l’Etat est à la tête du pays depuis 14 ans. Il faut faire les choses objectivement. Il ne faut pas faire le système de deux poids deux mesures. Il faut dénoncer, il faudra aller jusqu’au bout. Il aura beaucoup de chose sur ce dossier. Mais, ce n’est pas ouvrir le placard, quandon sait que vouspouvez trouver de squelette.

Question: Quel jugement portez-vous sur le rapport de l’Amnesty international, publié le 2 juillet dernier, concernant l’opération « Mbata Ya Bakolo », tenue au Congo/Brazza, dont les Congolais de Kinshasa sont des victimes de violence?

Réponse:Je vous invite à lire attentivement ce rapport. Amnesty international a fait une analyse exhaustive de ce qui s’est passé l’année passée, 2014 à Brazzaville, sur l’expulsion massive des ressortissants de la RDC à Brazzaville.

En effet, tout a été fait sans respecter les droits de l’homme, où plus179000 ressortissants congolais ont été simplement et purement jetés en dehors du territoire de ce pays voisin.Depuis des mois, les deux gouvernements (RDC et Brazzaville) avaient mis en place une commission.Rien n’a jamais démarré.Il y a des femmes qui ont été violées, les autres ont vu leurs biens expropriés.

Ca devient un problème de xénophobie contre les Congolais.Dans ce pays, la loi est violée, la vie des Congolais ne vaut rien.

Par LKT et GKM

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