RDC-Chine : Nécessité d’une intelligence stratégique dans le partenariat sino-congolais

RDC-Chine : Nécessité d’une intelligence stratégique dans le partenariat sino-congolais

La Chine est en quête du leadership mondial. Atteindre cet objectif impose à l’empire du milieu d’étendre ses investissements dans le monde entier, y compris en RDC. Pour tirer son épingle du jeu, Kinshasa doit signer un partenariat stratégique d’Etat à Etat avec Pékin. Mais avant, les décideurs congolais doivent vaincre les vulnérabilités qui minent les institutions.

Le 1er colloque international sino-africain sur le thème « Défis et enjeux de la sécurité en Afrique : quelles politiques et stratégies sino-africaines» vient de se tenir du 15 au 17 juillet 2015 à Kinshasa. Ce forum a réunit des expert Congolais, Africains et Chinois qui ont produit des réflexions utiles au renforcement de la Coopération entre la Chine et l’Afrique.

Est-ce que la République démocratique du Congo va capitaliser les retombées de cette conférence ? Cette question vaut tout son pesant d’or quand on sait la profondeur des analyses produites par les intervenants au colloque.

Forte de 4.000 milliards de réserves internationales, la Chine ne cache plus son ambition du leadership mondial. Ainsi, Pékin étend ses investissements dans le monde entier. En Afrique, l’empire du milieu est intéressé autant par les matières premières que par les opportunités d’investissement. Le continent noir étant le sous exploité de la planète. Des Etats africains ont encore besoin des infrastructures de bases (routes, écoles, hôpitaux, chemins de fer, etc.).

Cependant, consciente de la fragilité de la paix et de la sécurité en Afrique, Pékin entend s’investir, au cotés des pays africains, pour les aider à prendre à bras le corps ces défis jugés primordiaux pour améliorer et sécuriser le climat des affaires. C’est le leitmotiv du colloque dont la RDC a eu la primeur de l’abriter.

Pallier le déficit de connaissances

Il ressort de cette conférence que les Etats africains ont, cette fois-ci, le choix de décider du modèle économique pour leur développement. Mais seulement, les experts sont unanimes : les pays africains doivent s’armer d’une intelligence stratégique endogène pour mieux négocier avec leurs nouveaux partenaires chinois.

Pour Patrice Passy, expert en Intelligence économique et un des conférenciers au colloque sino-congolais, chaque Etat africain doit récupérer son retard en faisant une identification nationale des faiblisses, des forces, des menaces et des opportunités qui s’offrent à lui. « Si on ne le fait pas, on va continuer à faire les mêmes fautes que par le passé », soutient Patrice Passy.

La première vulnérabilité des Etats africains reste le déficit de connaissance, note-t-il. « L’information est un pouvoir en 2015. La maitrise de la production de l’information est un pouvoir. Si vous ne disposez pas de connaissances pour négocier alors que le monde s’est complexifié, les économies sont devenues interdépendantes, vous ne pourrez pas tirer votre épingle du jeu », dixit Patrice Passy.

De son avis, l’Afrique a encore toutes les chances de développer son économie. « Ce n’est pas perdu. Ce n’est pas trop tard. Il nous faut dans les 10 prochaines années nous dire que nous comprenons comment fonctionnent les Chinois. Nous savons déjà comment les Occidentaux ont fonctionné. Il faut maintenant faire des réflexions pour nous adapter de manière à tirer profit de nos partenariats », suggère Patrice Passy.

Bien plus, selon cet expert, les Etats africains doivent faire une « évaluation des politiques publiques, un recensement des moyens en personnes ressources et mettre en place un plan d’action susceptible de réduire les écarts et de définir les périmètres stratégiques des intérêts nationaux ».

Et de préciser : « ceci n’est possible que grâce à une doctrine nationale. La Chine a une pensée militaire, une doctrine économique, politique. Nous, nous n’avons ni une pensée, ni une doctrine. Nous naviguons à vue. C’est ce qui fait que quand un problème arrive, nous n’avons pas une mémoire de différentes situations pour pouvoir réagir en connaissance des causes ».

Quant au professeur Daniel Makiese Mwana wa Nzambi, Directeur du Groupe de recherche sur les études stratégiques africaines (GRESAF), organisateur du 1er colloque sino-africain, l’Afrique peut compter sur le plan de l’Union africaine « 2063 ». « Certes ce plan a été pensé à Addis Abeba mais il doit être exécuté par les Etats. C’est pourquoi il est demandé à chaque Etat de faire des efforts au niveau national de manière à ce que l’Union africaine les fédère au niveau continental », pense le professeur Makiese.

De son avis, la Chine conquiert ses marchés grâce à une intelligence économique. « Les Occidentaux n’ont jamais facilité la tâche aux Chinois pour qu’elle accède à leurs marchés stratégiques. Mais il faut féliciter les Chinois parce qu’ils ont réussi à s’installer sur les marchés occidentaux sans conflit, sans guerre, sans problème. D’où il faut développer des structures imprégnées d’intelligence économique », pense le professeur Daniel Makiese.

« L’Etat le plus puissant ce n’est pas celui qui dispose des minerais mais des institutions intelligentes, stables. Donc, il est impératif pour nous de pouvoir développer des institutions fortes pour permettre à ce que les Etats africains puissent être viables et fiables. On ne peut pas agir sans réfléchir. La démarche politique doit être soutenue par une intelligence qui permet à ce que l’action politique puisse avoir les effets positifs », soutient le directeur de GRESAF.

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