Police kinoise : Exit Kanyama le « conspirateur ». Et voici « Elvis »!


Le commissaire provincial ad intérim de la police kinoise Elvis Palanga Nawej. Capture d’écran RTNC

Placé sur « écoute » depuis le retour triomphal d’Etienne Tshisekedi wa Mulumba à Kinshasa fin juillet 2016, le patron de la police kinoise, le général Célestin Kanyama, un Luba du Kasaï, n’était plus en odeur de sainteté au sein de la « Kabilie ». Lundi 17 avril, l’homme qui affectionnait le morbide surnom d’ »Esprit de mort » a été suspendu – limogé? – de ses fonctions. Il serait suspecté de « comploter contre le raïs ». Selon des sources bien informées, il lui est interdit de quitter Kinshasa.

Dans une brève déclaration faite lundi 17 avril, le porte-parole de la police nationale, le colonel Pierre-Rombaut Mwanamputu – qui arborait son rictus légendaire – a annoncé la désignation du colonel Palanga Nawej, mieux connu sous le prénom d’ »Elvis », au poste de commissaire provincial ad intérim de la police kinoise. Exit, Célestin Kanyama.

Que reproche-t-on à Kanyama? « Insubordination », déclaraient certains analystes kinois dans la soirée de lundi. Le colonel Mwanamputu, lui, a préféré donné sa langue au chat. Interrogé par l’AFP, il a bredouillé qu’ »il n’y a pas d’autres communications à faire à ce sujet ».

Une chose paraît sûre : la sanction infligée au très redouté Kanyama a été décidée au niveau « de la plus haute hiérarchie » politique du pays. « Depuis qu’il a été placé sur la liste noire du département américain du Trésor, en juin 2016, Kanyama était placé sur écoute par l’ANR », confie une source kinoise. « Kalev Mutondo a mis dans la tête du président Kabila que Célestin Kanyama fait partie d’un groupe de conspirateurs qui prépareraient un putsch ».

Répression

En juin 2016, les autorités américaines avaient « sanctionné » le patron de la police kinoise. Washington lui reprochait d’être « responsable ou complice d’actes de violences et d’enlèvements ciblant des civils ». C’était lors des manifestations de janvier 2015.

Le général Kanyama a été frappé en décembre de la même année par un gel de ses éventuels avoirs en Europe et une interdiction de voyager dans l’Union européenne. La mesure avait été décidée par les ministres des Affaires étrangères des pays de l’UE. Ceux-ci l’avaient accusé d’être responsable de la « répression violente » lors de la manifestation du 19 septembre 2016 au cours de laquelle le Rassemblement avait prévu de signifier un « préavis » à « Joseph Kabila ».

Ne sachant pas qu’il était « surveillé » par les « services », Kanyama – qui dissimulait mal une certaine « déprime » après la « punition » US et européenne – s’est longuement épanché en étalant ses états d’âme. Il aurait confié à qui voulait l’entendre qu’il a été « sacrifié » alors qu’il n’avait fait qu’ »obéir aux ordres de la hiérarchie ». Il se voyait déjà dans une des cellules de la Cour pénale internationale à La Haye.

Le retour de « Tshitshi »

Après plusieurs mois passés en convalescence à Bruxelles et après le conclave de Genval qui a vu naître le « Rassemblement », Etienne Tshisekedi wa Mulumba a regagné Kinshasa fin juillet 2016. Une photo prise dans le jet qui a ramené « Tshitshi » a fait un tabac sur les réseaux sociaux. On y voit le général Kanyama en conversation plutôt cordiale avec le Président de l’UDPS. Les deux hommes étaient assis face à face. De quoi parlaient-ils? La question n’a jamais obtenu des réponses.

Selon une source proche de « Limete », Tshisekedi aurait « sermonné » Kanyama lors de ce bref entretien. Il lui aurait d’être au service d’un « pouvoir d’occupation ». Parlant en Tshiluba, « Tatu Etienne » aurait ajouté plus ou moins ces mots : « Kanyama, je te connais, tu es un Congolais. Mais tu travailles plus pour les intérêts d’un individu que pour l’intérêt national ». Sur un ton d’avertissement, Tshisekedi aurait ajouté : « J’espère que votre hiérarchie ne vous a pas chargé de m’escorter jusqu’à mon domicile pour m’empêcher de saluer les combattants venus m’accueillir… ». « Non, Mukulumpa », aurait murmuré Kanyama. On rappelle qu’aucun incident n’a été déploré.

« Elvis » dans le viseur des « faucons »

Nommé lundi 17 avril à titre intérimaire à la tête de la police provinciale de Kisnahsa, le commissaire supérieur principal Elvis Palanga Nawej est un homme plutôt apprécié par les Kinois.

Ancien de la Garde civile, cet officier de police aurait fait partie de la toute première promotion de « gardiens de la paix  » envoyés en formation en Egypte sous Mobutu Sese Seko. « Elvis n’a jamais été un va-t-en- guerre, commente une source policière. Il a toujours exhorté ses hommes à respecter la dignité de la personne humaine et à ne jamais toucher aux biens d’autrui ».

Ce « professionnalisme » unanimement salué pourrait devenir un « point faible » pour le successeur de Kanyama. Il semble que les « super faucons » du pouvoir kabiliste auraient apprécié modérément l’attitude courtoise affichée par des policiers lors du retour de Félix Tshisekedi à Kinshasa. C’était le même lundi 17 avril. « Il n’y a eu aucun incident à l’aéroport de Ndjili, glisse un analyste kinois. Elvis est un spécialiste du maintien de l’ordre. La mouvance kabiliste ne supporte guère ce genre de fonctionnaires qui privilégie l’intérêt général ».

Selon des bonnes sources, le général Célestin Kanyama est interdit de quitter la capitale. Au moment où ces lignes sont écrites, il semble bien que « Esprit de mort » attend toujours que la « hiérarchie » lui communique les faits qui lui sont reprochés afin de faire valoir ses moyens de défense. « Une ambiance de suspicion fait rage au sein du premier cercle du pouvoir kabiliste », conclut un confrère kinois…

B.A.W

Leave a comment

Your email address will not be published.


*