Apprendre à se battre comme les Congolais(es)

Notre  »naïveté légendaire » nous a appris à lutter en recourant à l’arme de la vérité ; souvent.
Sur le temps long, nous pouvons nous livrer à un petit inventaire. La traite négrière et la colonisation ont menti dans leur prétention de nous apporter  »la civilisation ». La néocolonisation a menti dans sa prétention de nous apporter  »le développement ». La mondialisation ultralibérale a menti dans sa prétention de nous vendre la démocratie. En principe, nous sommes au bout d’un cycle d’une centaine d’années à partir duquel rien ne pourra plus nous être vendu à moindre frais. En principe, nous devrions nous accorder avec Aimé Césaire qui, dans son  »Discours sur le colonialisme », soutient que les colonisés ont un avantage sur leurs colonisateurs ; ils savent que ceux-ci mentent. Nous devrions tirer des leçons de vie de ce mensonge entretenu tout au long de notre histoire avec nous-mêmes et avec l’autre ; rendre collectivement ce  »savoir » conscient.
Il est possible que je sois un rêveur. Dans mes rêveries, j’ai l’impression que les Congolais(es) sont l’un des peuples les plus forts du monde. Oui, je peux me tromper et même lourdement. Les plus éveillés d’entre nous me corrigeront. Je persiste et signe : les Congolais(es) sont l’un des peuples les plus forts du monde. Pourquoi ? Ils savent danser, oublier et embrasser leurs adversaires d’hier.
Bizarre ! Leur danse attire le monde entier depuis plusieurs années. Il est curieux que même leurs critiques les plus virulents invitent leurs musiciens dans leurs pays pour danser au rythme de la rumba congolaise ! Il arrive que pendant qu’ils dansent, ils chuchotent l’un ou l’autre  »secret » aux oreilles de nos fils et filles tout en croyant en  »la naïveté légendaire » du Congolais ou de la Congolaise. Le fait que les Congolais(es) aient été, à un certain moment, logé(e)s à la même enseigne leur a permis d’apprendre bien des choses et de leurs amis et de leurs ennemis.
Cette naïveté  »totalisante » a été une erreur de la part de l’autre ; de celui ou de celle qui, en dansant avec les filles et les fils du Congo-Kinshasa a perdu de vue le rôle cathartique de la danse. Que serions-nous devenus majoritairement sans cette rumba et sa grande capacité d’idéaliser l’amour, de conjurer le chagrin, l’adversité, la douleur, la trahison, etc. et d’ouvrir à un à-venir en chantant qu’  »A ta ndele, mokili ekobaluka » ? Que serions-nous sans ces convictions du genre  »lokuta eyaka na ascenseur ; vérité eye na escalier, ekomi » ? Ou cette autre :  »Mundele asali manduki ya koboma bato ; kasi ya koboma vérité, mundele akoki te ».
En fait, le Congo-Kinshasa est, entre autres,placé face à un problème de vérité ; il est placé face à la vérité de son histoire. Le grand cœur de ses filles et fils fait souvent le reste. Leur  »naïveté » aussi.
Les Congolais(es) sont un peuple constamment disposé à développer de bonnes relations avec  »ses partenaires historiques » en dépit des  »mains coupées », de l’assassinat de ses héros nationaux et du vol systématique de ses ressources du sol et du sous-sol. Ce peuple sait, malgré tout, dire des Belges qu’ils sont ses  »noko ». Malheureusement, cette capacité de se dépasser est souvent interprétée comme de la bête naïveté. Il peut accueillir tout le monde sur son territoire, lui donner à manger et à boire ; et même payer sa bourse d’études avant qu’il ne soit traité de  »Yuma ».
Pendant longtemps, j’ai aussi cru que nous étions des  »Yuma ». De plus en plus, je commence à douter. Et je me dis :  »Et si nous avions des leçons à apprendre au monde entier, les exceptions confirmant la règle ? Notre  »naïveté légendaire » nous permet d’archiver les grandes leçons de l’histoire.  »Les mains coupées » de nos aïeux ne nous ont pas apporté  »la civilisation ». La traite négrière en tant que moment de néantisation collective de notre  »bomoto  » fut un gros mensonge dans sa prétention  »civilisationnelle ». Tout comme la colonisation en tant que paradigme d’indignité.
Elle a abouti à la confiscation de notre indépendance économique en nous vendant mensongèrement une indépendance politique formelle.
Notre  »naïveté légendaire » nous a conduits à accueillir  »un conglomérat d’aventuriers » en  »libérateurs » et de croire plus tard en un faux processus politique affairiste. Petit à petit, le non-respect des textes supposément fondamentaux, la mise en place d’un régime criminel et kleptocrate, tout cela a fini par dévoiler la supercherie de  »nouveaux prédateurs ». Désormais dénudés, ils ne savent plus où donner de la tête.
Notre  »naïveté légendaire » a permis à certains amis de se confier à nous. Avant la mascarade électorale de 2011, un ami européen, responsable d’une importante ONG m’a appelé et dit ceci : »Mbelu, les Américains et les Britanniques vont encore accepter de travailler avec  »Joseph Kabila », même s’il tue un peu. Tshisekedi peut gagner les élections, mais il ne va pas gouverner. »
En fait, le 26 novembre 2011, les milices du  »Raïs 100 % » tiraient à balles réelles sur un groupe de compatriotes mobilisés pour aller accueillir Etienne Tshisekedi à l’aéroport de Ndjili.
Et quand, moi, Mbelu, je parle des acteurs pléniers et des acteurs apparents, je sais de quoi il s’agit.
Notre  »naïveté légendaire » nous a appris à lutter en recourant à l’arme de la vérité ; souvent.
Sur le temps long, nous pouvons nous livrer à un petit inventaire. La traite négrière et la colonisation ont menti dans leur prétention de nous apporter  »la civilisation ». La néocolonisation a menti dans sa prétention de nous apporter  »le développement ». La mondialisation ultralibérale a menti dans sa prétention de nous vendre la démocratie.
En principe, nous sommes au bout d’un cycle d’une centaine d’années à partir duquel rien ne pourra plus nous être vendu à moindre frais. En principe, nous devrions nous accorder avec Aimé Césaire qui, dans son  »Discours sur le colonialisme », soutient que les colonisés ont un avantage sur leurs colonisateurs ; ils savent que ceux-ci mentent. Nous devrions tirer des leçons de vie de ce mensonge entretenu tout au long de notre histoire avec nous-mêmes et avec l’autre.
Dans mes rêveries, je crois que notre méthode est difficile à adopter. Ses tactiques et ses stratégies seraient  »innées ». Nous nous offrons à l’autre  »naïvement » avant de commencer à apprendre de lui et à étaler ce qu’il nous a dit sur la place publique. Cette méthode est  »grave ».
Si l’autre nous promet qu’il vient se battre à nos côtés pour notre sécurité et notre démocratie, nous ne manquerons pas de commencer à lui poser des questions là-dessus à un certain moment, à publier des articles et des livres. A l’Est, nos compatriotes ont, à un certain moment, trouver les uniformes des FARDC chez certains membres de la Monusco. Yakutumba vient, à tort ou à raison, de crier en disant que l’ONU casse toute résistance congolaise au profit de  »Joseph Kabila » (https://www.youtube.com/watch?v=YQXyHe48imA&feature=share).
Mais, en cette matière, plusieurs compatriotes savent, depuis la nuit des temps, pour avoir lu Frantz Fanon, pour avoir vu l’ONU agir sur le terrain congolais, pour avoir lu certains travaux des chercheurs des latino-américains (et nord-coréens), que ce  »machin » est au service des impérialistes et de leurs alliés. Voici un petit résumé du milieu à partir duquel  »ce machin » opère :
 »La superbe d’Ackerman lui vient de son appartenance au « Conseil des Relations Extérieures » des EU (CFR pour son sigle en Anglais), dont il a été un des dirigeants.Et cela n’est pas rien si l’on prend en compte le fait que le CFR est l’instance à travers laquelle les élites au pouvoir impérial non seulement fournissent des présidents aux EU et dans le monde et des secrétaires généraux de l’ONU, mais aussi que le CFR décide du destin de la planète (voir l’article à ce sujetwww.alizorojo.com ou Consulter La educación en América latina : enfoque desde la institucionalidad del orden mundial capitalista chap 1 à la même adresse web
Rappelons nous que le CFR et l’« Institut Royal des Affaires Internationales (RIIA pour ses initiales en Anglais) sont les monstrueuses créations de l’« Institut anglo-étasunien des affaires extérieures”, ratifié par les « leaders » de l’économie britannique et nord-américaine à la fin de la première Guerre Mondiale (Alfred Milner, JP Morgan Jr, JD Rockefeller, A Carnegie, Lazard Frères, NL Rothschild). Dans la décennie des 50 du siècle passé, le CFR ainsi que son homologue britannique, le RIIA, décidèrent d’adopter une physionomie plus discrète. Ainsi furent constitués la Conférence du Bilderberg ou « Club du Bilderberg » et la « Maison de Chattham » respectivement. Comme les « membres » du CFR, du Club du Bilderberg, de la Trilatérale, de la CIA, de Carnegie, de la Rand Corporation, et des autres think tanks du pouvoir impérial sont interchangeables, Ackerman et son ICNC ne sont pas seulement les « fous » de l’échiquier de la sédition mondiale. »
Pour mieux comprendre cet extrait, il faudra lire tout cet article :https://www.legrandsoir.info/venezuela-theorie-de-coups-d-etats-doux-une-pratique-paramilitaire-de-violence-et-terreur-alizo-rojo.html. Il permet de comprendre ce que l’ami européen m’avait confié : les liens entre les services secrets anglo-saxons, l’ONU, les agences de sédition made in USA et les grands think tanks tels que la Trilatérale et le Bilderberg.
La méthode de lutte congolaise porte du fruit sur le temps long. Souvent, les documents déclassifiés des pays impérialistes et de leurs alliés viennent corroborer certains secrets de Polichinelle. Plusieurs documentaires sur  »les mains coupées » ou sur Lumumba aident les Congolais(es) à questionner un passé toujours présent. Hier, les mains ont été coupées pour le caoutchouc, Lumumba et les autres héros nationaux assassinés pour avoir compris cela ; aujourd’hui, plusieurs millions des Congolais(es) sont massacrés pour le coltan, le cabalt, l’or et le diamant ; les Munzihirwa, les Kataliko, les Chebeya, les Amarand Tungulu et les Pères Vincent Machozi sont assassinés pour avoir compris cela. Sur le temps, notre méthode nous apprend que les plus éveillés d’entre nous sont un danger pour les menteurs et les autres destructeurs de notre identité collective. En prendre bonne notre, c’est transformer, en conscience,  »notre naïveté légendaire » en actions sécuritaires et de défense organisées. Il y a un passage à effectuer entre cette  »naïveté légendaire » en des stratégies beaucoup plus réfléchies d’actions collectives libératrice.
Il ne sera pas exclu que demain, les dignes filles et fils du Congo-Kinshasa ayant compris cela, diversifient leur mode opératoire : qu’ils ajoutent aux mains nues, aux livres et aux articles, une armée puissante. Et qu’ils deviennent capables de dire, comme les Nord-Coréens, qu’ils ont souffert depuis plusieurs années sans qu’ils puissent bénéficier du respect de la souveraineté de leur pays comme un membre à part entière de l’ONU(https://www.legrandsoir.info/declaration-de-s-e-m-ri-yong-ho-ministre-des-affaires-etrangeres-de-la-republique-populaire-democratique-de-coree-au-debat.html). Il semble qu’à ce moment-là, il pourrait être tard pour  »les imposeurs des sanctions ». Le Congo-Kinshasa pourrait passer,  »officiellement », d’une  »république bananière » à un  »Etat voyou ». Et il sera trop tard.
Avant d’en arriver là, les Congolais(es) auront prouvé au monde entier qu’ils (elles) peuvent résister mains nues contre des guerres fondées sur le vol de l’histoire et des matières premières ; qu’il est possible de résister contre les voleurs avec comme seule arme  »la vérité » quand elle éclate au grand jour. Mais ils auront aussi souffert, dans leur chair et dans leur cœur, des revers de leur  »naïveté légendaire ».
Si mes souvenirs sont bons, le 01 octobre 2011, une année après la publication du Rapport Mapping, l’ex-secrétaire général du FPR/APR, Théogène Rudasingwa, écrivait un texte sur la guerre raciste de prédation menée contre les Grands Lacs Africains et le Congo-Kinshasa. Il avait pour titre, en français,  »La vérité doit être dite ». Il avait compris qu’il était venu le temps d’exposer les vampires à la lumière du soleil.

Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961

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