Une guerre à 8000 km du Congo-Kinshasa. Une petite explicitation

Des compatriotes ayant lu cet article jusqu’au bout ont compris qu’il y ait aussi question des luttes complémentaires et solidaires avec ceux qui sont sur  »le terrain Congo ». Certaines réactions très virulentes m’ont donné l’impression que le temps long dans l’histoire d’un peuple peut favoriser l’amnésie. D’autres encore m’ont convaincu qu’il y a des compatriotes qui lisent certains articles et ne les comprennent pas. D’autres enfin m’ont poussé à croire qu’il y a des articles abordés avec des préjugés soit favorables, soit défavorables. Cela dépend de celui qui les signe. Et c’est de  »bonne guerre ».

Néanmoins, en réfléchissant, je me pose la question de savoir comment serait construit le rétrécissement du champ de vision des compatriotes ayant oublié que la guerre menée contre le Congo-Kinshasa lui est arrivée à plus de 8000 km. Que c’est la guerre des  »Clinton ». Et que les  »Clinton » n’habitent pas le Congo-Kinshasa. Ce sont des américains. Kagame, c’est leur  »kind of guy comme Suharto, par le passé. (http://www.voltairenet.org/article167964.html). Ils coopèrent avec l’ONU sur place pour que  »leur volonté soit faite ». Les plus audacieux d’entre nous en ont fait les frais ; même s’ils n’ont pas baissé les bras. (Et ils savent ce que je veux dire.)

En citant  »Noir Canada » d’Alain Deneault, j’avais en tête la liste des principales sociétés citées dans la criminalité (et la guerre) en Afrique et au Congo-Kinshasa, en annexe. Elle donne quelques détails sur leurs conseils d’administration. Elle aide à voir qui est intervenue dans cette guerre.

En citant le livre de Patrick Mbeko, je voyais, en plus de son contenu, la postface d’un avocat au TPIR, Christopher Black, l’un des connaisseurs de la nature de cette guerre.

J’aurais pu citer  »Carnages. Les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique » de Pierre Péan. Un livre montrant l’implication des USA, de la Grande-Bretagne et d’Israël dans la guerre du Congo-Kinshasa. Ou encore  »Paix et châtiment. Les guerres secrètes de la politique et de la justice internationales » de Florence Hartmann.

Tous ces livres (et plusieurs autres) indiquent que les acteurs et les commanditaires de la guerre raciste et de basse intensité livrée contre le Congo-Kinshasa ne sont pas sur  »le petit terrain Congo ». Ils sont éparpillés à travers le monde. Ils coalisent à travers un réseau transnational de prédation et de mort. Constituer un contre-réseau transnational de lutte est possible. Entrevoir une possibilité, cela signifie ouvrir un champ de possibles illimitées.

Certains de mes critiques ont donné l’impression que je parlais d’une et unique possibilité. Une bonne occasion pour un défoulement ! Très bien ! C’est de bonne guerre ! Du moment que le conflit se limite au débat et ne devient pas meurtrier. Il permet d’expliciter la pensée.

Madame Bénédicte Kumbi le fait mieux en lingala. Elle relis l’histoire des autres et la nôtre en montrant que lutter à plusieurs kilomètre de chez soi est possible. Je la copie :

 »Heure moko bobakisa pe mayele pe botika ba complexe. Bokomi bino nionso ba tshaku « terrain, terrain, terrain, concret, concret, concret ». Tokomi na wenze to nini po batu babelela ndenge wana? Histoire ya ba luttes n…a mokili oyo eteya bino mwa mukie. Ba Vietnamiens oyo ba longa ba Américains, boyebisa ngai po na nini bazalaki kotinda batu na bango mokili mobimba balobela lutte na bango? Boyebisa ngai po na nini ANC azalaki na batu na ye libanda? Bo yebisa ngai po na nini Dr Mukwege andimaka kotambola mokili mobimba.? Boyebisa ngai po na nini batu oyo balela ba décideurs bakimaka mbangu soki Didier, to Emmanuel, to Donald na ba Cohen babengisi bango? Pendant que bozo développer ba complexes na bino d’infériorité eza na batu oyo bazotala ndengi nini synergie ekoki kozala entre Congo na diaspora. » Un compatriote, lecteur de Madame Kumbi (sur son mur), évoque l’exemple de l’Iran en ces termes :  »L’ayatollah Khomeiny a déclenché une révolution en Iran alors qu’il vivait dans une banlieue à Paris. Il envoyait clandestinement des cassettes audio en Iran pour véhiculer son idéologie et éveiller les masses contre l’impérialisme. Quand la population a compris, tout le peuple, hommes, femmes et enfants sont sortis dans la rue massivement pour faire tomber la dictature. » Pour illustrer sa pensée, il a ajouté une vidéo :https://www.youtube.com/watch?v=GCiY06WdhEQ&feature=youtu.be.

Ceci est un bon signe. Il y a encore des compatriotes en recherche. Ils étudient et veulent comprendre comment les autres ont fait. Il n’y a donc pas à désespérer du Congo-Kinshasa ; les minorités organisées en conscience ne baissent pas la garde. Elles savent qu’elles finiront par devenir une masse critique.

Il est possible qu’une certaine lassitude, un certain fanatisme, une certaine paresse intellectuelle, une certaine amnésie, une certaine colère liée au fait que des compatriotes voudraient qu’il y ait un changement rapide au pays, une certaine ignorance des victoires historiques des autres peuples sur leurs adversaires internes et externes, un certain enferment dans la pensée unique ou tout cela à la fois puisse guider la lecture que certains compatriotes font des issues possibles proposées à la guerre perpétuelle que connaît notre pays depuis plus de sept décennies.

L’un des antidotes contre tout cela semble être, à mon avis, un apprentissage en commun à travers des collectifs citoyens responsables, un travail en synergie entre les compatriotes opérant sur  »le terrain Congo » et  »le terrain africano-mondial » et des lieux des débats non meurtriers. La lumière de la vérité est au bout du choc des idées.

De toutes les façons, je demeure preneur d’un débat d’idées quelle que soit sa forme. J’avancerai mes arguments sans chercher nécessairement à convaincre.

 

Babanya Kabudi

Génération Lumumba 1961

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