Freddy Mulumba Kabuayi, George Soros et le Congo-Kinshasa

Freddy Mulumba Kabuayi aime les livres. Il aime lire. Il lit beaucoup sur le Congo-Kinshasa, sur l’Afrique. Il s’intéresse depuis longtemps à la géopolitique et à la géostratégie. Pour l’avoir fréquenté, je sais qu’il est très critique à l’endroit des intellectuels et des politiciens congolais. Il est souvent d’avis que plusieurs parmi ces derniers sont des »badi ba bidia » ( des mangeurs de fufu ; sans plus). Il a quelque chose d’attrayant : il lit et fonde souvent ses arguments sur des faits et une documentation suffisamment sourcée.

Je viens de lire sa recension un ouvrage de trois journalistes français intitulé  »Les réseaux Soros à la conquête de l’Afrique »(https://legrandcongo.com/le-complot-de-soros-contre-la-rdc-mis-a-nu/). Mettant à nu le mode de fonctionnement de ces  »réseaux », cette recension cite les noms de quelques hommes politiques congolais, de quelques ONGs et d’une radio impliqués dans le complot contre le pays de Lumumba. Feignant d’être  »philanthrope », George Soros, en bon stratège, instrumentaliserait tout ce beau monde pour devenir  »un chef d’Etat sans Etat » au cœur de l’Afrique. Il chercherait tout simplement à faire main basse sur les richesses du pays de Lumumba.

Son soutien à la campagne électorale des candidats démocrates aux USA obéirait au même projet.

Tel est le complot qu’il serait en train d’ourdir contre le Congo-Kinshasa.

La recension de Mulumba Kabuayi mentionne un fait important : le poids des multinationales sur les Etats-nations. Elles sont devenues plus riches et plus fortes. George Soros en sait quelque chose. Il travaille avec Barrick Gold.

Ce fait n’est pas tellement nouveau. Même si, selon certains auteurs, il a pris de l’ampleur vers les années 1990 quand les trans et les multinationales sont devenues  »les nouveaux cercles de pouvoir ».

A mon avis, cette recension gagnerait en remettant en question une certaine approche que les auteurs du livre ont de  »l’ anti-kabilisme ». Alias Joseph Kabila, en finançant un lobbying de plusieurs millions de dollars aux USA obéit à la même logique de vassalisation que les politiciens susmentionnés. Il a en fait été mis là pour être au service des trans et des multinationales comme le dit si bien Jean-Luc Schaffhauser dans cette vidéo :https://www.youtube.com/watch?v=5Ca5M6Txigw. La question fondamentale serait celui de voir les politiciens congolais et africains devenir des acteurs de l’émancipation politique du continent en rompant avec le rôle de  »nègres de service » dont ils se contentent depuis l’assassinat de Lumumba jusqu’à ce jour.

Une autre question est liée au mode opératoire des  »réseaux Soros » en lien avec  »l’Etat profond US ».

Ces  »réseaux » fonctionnent au cœur de tout un système ploutocratique formant  »une corporatocratie » ayant en son sein des services secrets, de grandes trans et multinationales, des experts, des lobbyistes, des journalistes, des radios, des télévisions, etc. Cet  »Etat profond » n’est ni de gauche ni de droite. Il est la matrice organisatrice de la domination du 1%.

A mon avis, Freddy Mulumba gagnerait dans l’approfondissement du  »complot Soros » en allant lire Peter Dale Scott (La machine de guerre américaine. La politique profonde, la CIA, la drogue, l’Afghanistan,…, Paris, Demi-Lune, 2012.). Le même auteur a consacré tout un ouvrage à l’étude de  »l’Etat profond ». (Souvent, l’analyse de la politique US, au Congo-Kinshasa, se limite aux  »deux partis de l’argent », les démocrates et les républicains en oubliant qu’ils l’envers et l’endroit d’une même pièce de monnaie, le dollar.)

Comme Freddy Mulumba a recensé un ouvrage collectif des français, il pourrait aussi aller lire  »Vincent tout-puissant. Une enquête que Bolloré a voulu empêcher » (Ed. Jclttès, 2018). Ce livre atteste que  »l’ Etat profond » n’est pas une spécificité américaine. La France en a aussi. Et ses liens d’affaires en  »réseaux » avec l’Afrique sont efficaces.

En effet, la question étudiée par l’ouvrage recensé par Mulumba Kabuayi est bien documentée dans un article du Monde diplomatique (Manière de voir, avril-mai, 2009). Il est écrit par Hernando Calvo Ospina et est intitulé  »L’exportation de la démocratie ». Il décrie les liens existant entre plusieurs ONGs américaines opérant au Congo-Kinshasa avec  »leurs véritables cercles de pouvoir » et leurs services secrets au nom de l’argent.

Lire et commenter la recension de Freddy Mulumba Kabuayi, cela n’est pas pour moi un hasard. Ce texte aborde et provoque des problématiques ne faisant pas partie du  »débat des idées » au Congo-Kinshasa. Etre financé par des ONGs étrangères ne pose presque pas de problème dans les milieux politiques et dans la société dite civile. Cela paraît très normal. Les incidences et les conséquences de ce financement sur la marche du pays ne sont pas (pour presque pas débattues).

Cela étant, croire que le lobbying mené par la kabilie est meilleur que  »le complot de Soros » serait une approche fantaisiste de  »nouveaux cercles de pouvoir ». Lire  »Le totalitarisme pervers. Aux origines de la médiocratie » (2017) d’Alain Deneault (https://www.youtube.com/watch?v=osl8AjdiruE) aiderait Freddy et les auteurs dont il recense le livre à comprendre que La France n’a presque pas de leçon à donner sur les questions abordées.

Babanya Kabudi

Génération Lumumba 1961

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