Stratégie du chaos et thérapie du choc. Nécessité d’un sérieux déformatage d’un certain imaginaire congolais au sujet de  »l’aide humanitaire »

 »Ils nous dominent plus par l’ignorance que par la force » S. BOLIVAR

Une guerre perpétuelle finit par produire un appauvrissement anthropologique et une crise de sens.

Etre appauvri spirituellement, politiquement, culturellement, économiquement et socialement, cela peut conduire à la perte de repères, à la désorientation, au dépaysement, au déboussolement ; bref à la perte de dignité et de sens à donner à la vie collective.

Au moment où j’écris ces lignes, un débat houleux se mène entre les partisans de l’aide dite humanitaire à donner aux millions des Congolais(es) opprimé(e)s, réprimé(e)s, assujetti(e)s, abruti(e)s, soumis(e)s aux caprices des négriers des temps modernes, (complices du réseau transnational de prédation mis en place au cours d’une guerre raciste de basse intensité de plus de deux décennies) et les fanatiques de l’aide fatale de la communauté occidentale.

Des questions du genre :    »Pourquoi, le Congo-Kinshasa dit  »scandale géologique » aurait-il besoin d’une fausse aide humanitaire ?, ou comment ce pays, aidé pendant plus de six décennies, n’arrive-t-il pas à se prendre en charge ?; ou encore comment ce pays en est-il arrivé là », toutes ces questions semblent être évitées. Et l’aide est jugée pratique et urgente. Terrible !

Quand Rossy Mukendi est tué par  »la police politique de la kabilie » à Kinshasa, des jeunes congolais mobilisent les réseaux sociaux et récoltent dans un bref délai 22.000 dollars. Ils prouvent que les Congolais(es) ont la capacité de se mobiliser et de répondre aux questions urgentes qui se posent dans leur pays par eux-mêmes. Avant l’assassinat de Rossy Mukendi Tshimanga, les Congolais Debout ont sillonné certains hôpitaux et paroisses de la capitale congolaise pour apporter leur aide. Aussi les sommes d’argent que les Congolais(es) envoient au pays par les agences (de transfert) dépassent-elles de loin l’aide dite humanitaire. Ils (elles) ont donc la capacité de se prendre en charge. Mais pourquoi le Congo-Kinshasa est-il, tout d’un coup, soumis à l’urgence d’une aide des  »donateurs » ? Pourquoi ?

Pourtant, il n’y a pas longtemps que Jacques Chirac disait qu’une bonne partie d’argent qui est dans le porte-monnaie français vient de l’Afrique. L’affaire Sarko-Kadhafi est un exemple éloquent. Les sommes d’argent  »offertes » par Bongo, Sassou, Mobutu, etc. à  »la principauté française de non-droit » sont mentionnées dans  »La république des mallettes » de Pierre Péan (2011). (Les lecteurs pressés ayant le livre peuvent aller rapidement à la page 233).

D’où vient que cette Afrique  »offrant » des sommes d’argent considérables à  »la république des mallettes » puissent être aidée ? Le monde à l’envers !

Des compatriotes pleurnichent et s’en prennent au sous-réseau de prédation opérant à partir du Congo-Kinshasa. Ils le dénomment abusivement  »gouvernement ». Ils ont oublié les confidences faites par Lambert Mende, publiquement, le 26 mars 2016 :  »Les grandes puissances ont coalisé avec des groupes des criminels pour tuer les paisibles citoyens congolais ». Ils ont oublié que cette guerre anglo-saxonne a dépouillé les Congolais(e)s de leur dignité et provoqué la régression anthropologique au pays. Ils ont oublié que le sous-réseau affairiste du régime de la kabilie a été mis en place pour être au service des trans et multinationales. Ils ont oublié que ce sous-réseau a fait de plusieurs de nos compatriotes des  »indigents » enterrés à Maluku et dans plusieurs coins du pays dans des fausses communes. Ils ont oublié. Oui. Ils ont oublié. Ils ont oublié que la guerre raciste dépouillant les Congolais(e)s de leur dignité pour en faire des mendiants est à la fois  »une opération économique rentable » (Riccardo Petrella) et  »une stratégie de chaos » conduisant à la mise sur pied d’une  »thérapie du choc » dont l’aide dite humanitaire est un ingrédient. Ils ont oublié. (à suivre)

Pour aller plus loin :

N. KLEIN, La stratégie du choc. La monté du capitalisme du désastre (2008)

N. KLEIN, Dire non ne suffit plus. Contre la stratégie du choc (2017)

P. PEAN, La république des mallettes. Enquête sur la principauté française du non-droit (2011)

M. COLLON, Bush, le cyclone (2005)

M. COLLON, La stratégie du chaos. Impérialisme et islam, 2011

P. PIGNARRE et I. STENGERS, La sorcellerie capitaliste. Pratique de désenvoûtement (2005)

E. TOUSSAINT, Le système dette. Histoire des dettes souveraines et leur répudiation (2017)

P. MBEKO et H. NGBANDA, Stratégie du chaos et du mensonge, 2014

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