Le Congo-Kinshasa et l’illusion de l’insularité

 »Nkaya nlutatu, babidi mbapite »

Le Congo-Kinshasa n’est pas une île. Comme territoire, il est entouré de neuf voisins et il est situé au cœur d’un continent ayant plus de cinquante pays. La mondialisation et la révolution numérique le relient à presque tous les pays du monde. La guerre perpétuelle de prédation et de basse intensité dont il est victime est  »un morceau » de la guerre des  »globalistes » contre les peuples. L’un d’eux, Warren Buffet, se confiant à New York Time du 26 novembre 2006(et cité par Le Monde du 20 novembre 2008), dit ceci : « Il y a une guerre des classes, c’est un fait, mais c’est ma classe, la classe des riches qui la mène et nous sommes en train de la gagner. »

Commentant cette  »confidence », Michel Geoffroy écrit ce qui suit : « L’homme qui déclare cela n’est pas un marxiste-léniniste attardé. C’est l’Américain Warren Buffet, la troisième fortune mondiale en 2016, avec 65,9 milliards de dollars selon le classement Forbes. Le « sage d’Omaha » est un magnat de la finance, des médias et de l’agroalimentaire. Ami de Bill Gates, conseiller du Président Obama, et grand financier de fondations devant l’ Eternel. Grand donneur de leçons aussi. » (M. GEOFFROY, La superclasse mondiale contre les peuples, Versailles, Via Romana, 2018)

Quelles formes cette  »guerre des classes » peut-elle prendre ? Les formes  »hard »,  »soft » et  »smart ». (Lire S. ERBS, V. BARBE et O. LAURENT, Les réseaux Soros à la conquêtes de l’Afrique. Les réseaux d’influence à la conquête du monde, Versailles, Va Editions, 2018, p.128) Quels sont les moyens et les instruments auxquels recourt cette  »guerre des classes » ?  »Le bâton et la carotte », la conquêtes des têtes et des esprits par l’école, l’université, les ONG, les experts, les IFI, le lobbying et les médias dominants interposés. La conquête des têtes et des esprits facilite l’imposition d’une croyance selon laquelle il n’y a pas une autre possibilité de développer l’économie mondiale en marge du  »capitalisme ensauvagé ». Dès que cette croyance a conquis les têtes et les esprits, elle y devient une conviction selon laquelle il n’y a pas d’alternative à ce  »capitalisme ensauvagé » (et à ses fondés de pouvoir jouant le rôle de  »petites mains » au cœur d’un  »capitalo-parlementarisme » dénommé abusivement  »démocratie ».

Connaître ce fait en conscience est indispensable aux peuples et à leurs leaders patriotes. Pourquoi ?

Cette connaissance en conscience permet de se rendre compte que  »le capitalisme ensauvagé » est une créature d’une classe consciente de sa guerre contre les peuples. Et qu’il est possible que ces peuples produisent leur propre  »Idée » pouvant les aider à rompre avec  »la stratégie du choc et du chaos » liée à  »la montée de ce capitalisme du désastre ». (Lire N. KLEIN, La stratégie du choc. La montée du capitalisme du désastre, Actes Sud, 2008 ; M. COLLON et G. LALIEU, La stratégie du chaos. Impérialisme et islam. Entretien avec Mohamed Hassan, Bruxelles, Investig’Action, 2011) Produire une  »Idée » alternative à celle du capitalisme  »ensauvagé » exige, en plus d’une  »connaissance en conscience » de la guerre de tous contre contre tous qu’il provoque perpétuellement une auto-organisation populaire comme trajet d’apprentissage en commun et lieu de mobilisation permanente. Connaître en conscience et agir en s’auto-organisant, cela marche de pair.

Et au cœur de cette auto-organisation, des  »minorités éveillées » pourraient jouer le rôle du  »levain dans la pâte » sans prendre une position de surplomb. Car il s’agit de renverser la pyramide hiérarchique de façon que  »les peuples deviennent d’abord » les démiurges de leur propre destinée.

Ce renversement de vapeur devrait être prioritairement local. Il partirait de petits collectifs citoyens interconnectés du quartier au village, du quartier à la cité, au secteur, au territoire, etc.

Au cours de cette  »guerre des classes », le Venezuela, Hugo Chavez s’est risqué sur cette voie avec son peuple en travaillant ensemble pour qu’il sorte de l’analphabétisme et de la pauvreté crasse. Malheureusement, il n’avait pas en tout et pour tout rompu avec l’  »Idée capitaliste ». Une bonne partie de la propriété vénézuélienne était entre les mains des  »fondés de pouvoir du capital. » Cela leur a permis de mener la vie dure à son successeur et au peuple vénézuélien qui ne s’avoue pas encore vaincu. Chavez lui a légué des  »contre-stratégies » en se démultipliant.

En Bolivie, Evo Morales a bien joué le rôle du  »levain dans la pâte » jusqu’au récent coup d’Etat. De ce coup d’ Etat, les siens ont tiré quelques leçons. Ils estiment que « les mouvements socialistes qui arrivent au pouvoir doivent neutraliser leurs plus grands ennemis locaux. Ils doivent construire leurs propres défenses. Ils ne peuvent pas compter sur des institutions comme l’armée et la police dont ils héritent des régimes précédents. De tels mouvements ne doivent jamais compter sur des organisations affiliées aux États-Unis comme l’OEA ou sur du personnel militaire et policier qui a été endoctriné par les États-Unis. Un mouvement a besoin d’une voix publique. Il doit construire ses propres médias au niveau local et international.
Hugo Chavez savait tout cela. Dès qu’il a remporté l’élection présidentielle au Venezuela, il a mis sur pied les forces nécessaires pour défendre l’État. C’est la seule raison pour laquelle son successeur, Nicolás Maduro, a vaincu la tentative de coup d’État contre lui et est toujours au pouvoir. » (https://www.legrandsoir.info/les-lecons-a-tirer-du-coup-d-etat-en-bolivie.html

Les leçons à tirer du coup d’État en Bolivie. 2015-05-21_11h17_05Par Moon of Alabama – Le 12 novembre 2019. Le coup d’État en Bolivie est dévastateur pour la majorité de la population de ce pays.
www.legrandsoir.info

L’expérience cubaine tient encore le coup. Elle semble être pratiquement un miracle !

Le Congo-Kinshasa devrait rompre avec l’illusion de l’insularité, apprendre de son histoire et des autres. Dans un monde devenant de plus en plus interdépendant, il ne devrait pas ignorer les expériences des peuples en lutte pour leur souveraineté, leur autodétermination et leur émancipation de l »’Idée capitaliste » et de ses  »globalistes ».

Il devrait aussi apprendre de son histoire. Il fut programmé comme pays à détruire à côté de beaucoup d’autres tels que la Libye, la Yougoslavie, la Syrie, la Somalie, l’Irak, etc. Il ne peut plus, tout en voyant ce qui est arrivé et/ou est encore en train d’arriver à certains de ces pays, croire qu’en faisant la même chose toujours et encore la même chose (avec les mêmes), il obtiendra des résultats différents. Non. Il a besoin d’une auto-organisation populaire rompant avec le statu quo et renversant localement et nationalement la pyramide hiérarchique. C’est ça que signifie  »le peuple d’abord ». Ensuite, Il doit produire et adhérer à l »’Idée de la production collective du commun ». Il sera absurde que s’affirmant  »démocratique », il accepte  »le mythe thatchérien » selon lequel  »il n’y a pas d’alternative  » au capitalisme ensauvagé. Enfin, son grand mouvement auto-organisé devrait être le lieu où le débat rationnel et raisonnable, la délibération et les décisions collectives contribuent à  »la production collective du commun ».

Au vue de la perte de la boussole éthique des globalistes et de leur production exponentielle des inégalités, le pays de Lumumba doit choisir sa voie :  »produire collectivement le commun ». Il n’y a pas de  »démocratie » là où  »l’un » s’impose comme l’unique possible.

Babanya Kabudi

Génération Lumumba 1961

Leave a comment

Your email address will not be published.


*