Entre deux proxys,  »les parrains » finissent par choisir. Le cas du Kongo-Kinshasa

 »L’histoire nous apprend que nous ne savons pas apprendre de l’histoire » Michaëlle Jean

Plusieurs compatriotes ont commis l’erreur de croire que  »les élections-pièges-à-cons » organisées au Kongo-Kinshasa ont mis fin à la guerre perpétuelle menée contre ce pays. Ils sont victimes de l’enfermement dans le temps court. Par ignorance, par assujettissement, par abrutissement, par paresse intellectuelle et par tout cela à la fois, plusieurs compatriotes ont renoncé à penser le pays sur le court, moyen et long terme ; sur le temps long.

Juste après  »les élections-pièges-à-cons » de 2018, certains articles et livres ont été publiés et dont certains avaient pour titres :  »Sans un seul coup de feu ». Mais ils n’ajoutaient pas ceci comme sous-titre :  »Pour combien de temps ? ». D’ailleurs, ces articles et livres commettaient l’erreur de ne pas mentionner tous les coups de feu ayant précédé ces  »élections » et les morts qu’ils avaient occasionnés. Dieu merci ! Notre diaspora avait pris soin de publier un ouvrage collectif sur le sujet. Elle avait publié un livre intitulé :  »Les Congolais rejettent le régime de Kabila » (Les congolais rejettent le régime de Kabila – INGETA )

Deux ans après ces  »élections », les Kongolais peinent à en récolter les dividendes pour leur vie quotidienne. Et les proxys des forces économiques dominantes organisent un cirque à même d’embraser le pays. Du côté de l’un des proxys n’ayant pas réussi à voyager ce samedi 05 décembre 2020, des messages fusent, dont celui-ci :  » On ne joue pas avec le feu. On risque se brûler ».

En principe, ce n’est pas lui qui parle :  »Il est parlé. » Il débite ces deux petites phrases après ce qu’il a eu à organisé comme  »voyages diplomatiques ». La naïveté consisterait à ne pas écouter et méditer ces deux bouts de phrases. Pourquoi ? Ils ne sont pas prononcés par un idiot. Ils sont prononcés par un compatriote connaissant le Kongo-Kinshasa de l’intérieur et ceux qu’en veulent  »les parrains ».

 »L’histoire nous apprend, dit, Michaëlle Jean, que nous ne savons pas apprendre de l’histoire ».

Si ce compatriote parle, il me semble, c’est parce qu’il a su apprendre de l’histoire. Il sait, à moins que je me trompe, qu’entre deux proxys des forces économiques dominantes, les disputes peuvent inciter celles-ci à choisir pour l’un ou pour l’autre, ou pour l’un contre l’autre.

Les exemples les plus récents nous enseignent qu’ils ont opté pour Kagame et Museveni contre Laurent-Désiré Kabila en 2001, pour  »Joseph Kabila » contre Jean-Pierre Bemba en 2006, pour  »Joseph Kabila » contre Etienne Tshisekedi en 2011.

Plusieurs compatriotes le savent et oublient rapidement. Souvent, ils ne se posent pas la question de savoir ce qui préside à ce choix. Sur ce point, je partage l’approche de Valéry Bugault quand, étudiant l’histoire d’un acteur géopolitique anonyme à la conquête du monde que sont des forces économiques dominantes, elle dit ce qui, profondément, les caractérise :  »l’aptitude au mensonge, l’absence d’état d’âme, l’absence de toute empathie et de bienveillance vis-à-vis de la vie, la volonté hégémonique. » (V. BUGAULT, Demain, dès l’aube…le renouveau, Paris, Sigest, 2019, p. 74)

La voie pour la réalisation de cette volonté hégémonique passe par  »la ruse, le mensonge, la duperie, la perversité et la corruption » (Ibidem, p.110).

Les proxys partageant mieux ces caractéristiques et les passions tristes susmentionnées ont plus de chance d’être choisis comme  »négriers des temps modernes » que ceux qui, par  »erreur stratégique  », commencent à parler du  »peuple d’abord », de  »l’Etat de droit », de  »l’union sacrée pour la nation », etc.

Pourquoi ? Ils risquent, aux yeux des  »parrains », de réaliser le rêve de Lumumba et de refaire de leurs compatriotes un peuple digne au cœur de l’Afrique.

Bien que sachant que  »Rome ne paie pas toujours ses traîtres », je suis d’avis que dès que les forces économiques dominantes lisent chez l’un ou l’autre de leurs proxys des velléités réelles et/ou fantasmées d’orientation vers un minimum d’indépendance et de souveraineté, elles intensifient la guerre perpétuelle.

Cela risque de se passer au Kongo-Kinshasa où la connaissance et l’identification du véritable  »ennemi des peuples et des Etats » sont restées la chose la moins partagée par les compatriotes.

Nous aurions un peu plus gagné à lutter pour les valeurs, les principes et les règles au lieu de promouvoir le culte de la personnalité de  »nos autorités (im)morales », ces  »négriers des temps modernes » au service des forces économiques dominantes capables de les opposer à tout moment et d’infliger la violence et la mort aux populations n’ayant pas eu le temps d’apprendre à rompre avec l’abrutissement, l’appauvrissement anthropologique, l’assujettissement, la précarité et la bêtise.

Les jours, les mois et les années à venir risquent d’être riches en rebondissements. Ils risquent d’être un boulet aux pieds de tous ces compatriotes convertis en thuriféraires, en tambourinaires, en fanatiques ou en applaudisseurs de ces  »négriers des temps modernes  » dont les accords signés servent d’abord leur avidité, leur cupidité et  »leurs maîtres » aux dépens de l’intérêt collectif et de l’intérêt commun.

Si tous ces compatriotes ne se re-convertissent pas en artisans des causes telles que l’autodétermination et la souveraineté du Kongo-Kinshasa en rompant avec le culte de la personnalité, nous risquons de  »rouler la pierre de Sisyphe » et d’avoir, pour longtemps, avant que ne se lève un leadership collectif consciencieux, lucide et responsable pour entraîner le pays sur une nouvelle voie dont Lumumba a déjà tracé les lignes maîtresses, nos yeux pour pleurer.

Pour cause.Les forces économiques dominantes qui embrigadent  »nos négriers des temps modernes » que nous nommons abusivement  »autorités morales » dans  »une guerre de tous contre tous » n’ont pas d’état d’âme et de bienveillance vis-à-vis de la vie. Elles ont mis l’ONU dans leur poche. Frantz Fanon le sait depuis les années 1960. Et nous, nous croyons bêtement qu’elle peut nous sauver. Mawa !

Allons-nous sortir ensemble dans la rue pour dire  »N O N » à l’intensification de la guerre perpétuelle au Congo-Kinshasa ? La balle est dans notre camp avant qu’il ne soit trop tard.

Babanya Kabudi

Génération Lumumba 1961

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