Les ambitions interventionnistes de Paul Kagame et l’éveil kongolais

 »Ils portent à nouveau, en cette heure critique pour l’humanité, toutes nos fautes.  Ils sont l’avant-garde d’une lutte capitale contre Le Grand Mensonge qui nous détruit tous. » J. CARRERO

La Libre Belgique a publié, hier, le 08 avril 2021, une carte blanche de l’ex-ambassadeur Belge au Rwanda (1990-1994). Cette carte blanche m’a renvoyé à un texte écrit par Théogène Rudasingwa, le 01 octobre 2011, une année après la publication du Rapport Mapping. Ce texte était intitulé  »La vérité, enfin » (La vérité, enfin! – Echos d’Afrique ). La carte blanche de l’ex-ambassadeur Belge est un questionnement au sujet de la vérité :  »A quand le dévoilement de la vérité sur le génocide rwandais ? »(A quand le dévoilement de la vérité sur le génocide rwandais? – La Libre )

Donc, plus deux décennies après la grande tragédie des Grands Lacs Africains, la bataillepour en connaître  »la vérité  » se poursuit. A ce sujet, Juan Carrero est convaincu de  »la vérité » de cette bataille. Pour lui, « (…) la bataille fondamentale, la bataille finale, est et sera la bataille contre le mensonge, un mensonge qui, dans ce conflit, s’est institutionnalisé au niveau mondial » (Lire Rwanda-RD Congo 1990-2021: L’humanité a beaucoup à perdre dans cette grande tragédie avec des caractéristiques uniques dans l’histoire [Joan Carrero, 04.04.2021] – L’HORA (l-hora.org)) Avec lui, j’estime que cette bataille vaut la peine d’être menée afin d’enrichir les réponses déjà données à la question que pose M. Swinnen.

Pourquoi l’ex-ambassadeur Belge pose-t-il cette question tout en critiquant le rapport Duclert, remis dernièrement au Président Français, Emmanuel Macron ? Tout en soutenant que ce  »rapport (est) coupable de légèreté », il est d’avis que « trop souvent nous sommes confrontés à des présentations aussi partiales que peu subtiles de la tragédie rwandaise. C’est comme si nous étions alors acculés à ranger toutes les victimes dans un camp ethnique et tous les coupables dans l’autre. » Il relève le fait que dans ce rapport, « les responsabilités du Front patriotique rwandais (FPR) sont tantôt passées sous silence et tantôt sous-estimées. Le malheur causé par les attaques récurrentes du FPR de 1990 à 1994 contre les centaines de milliers d’agriculteurs en fuite est largement édulcoré. » Et il partage sa conviction en ces termes : « Je persiste à croire que la discrétion dont s’entoure la diplomatie a ses méthodes et ses raisons. Or, fermer les yeux n’est désormais plus possible. Les agendas et leurs acteurs doivent être démasqués. Tout le monde n’en est pas convaincu, mais beaucoup le sont. Il n’y a pas si longtemps, j’écrivais : « Après tout, ne nous sommes-nous pas trompés au sujet de Paul Kagame et de son Front patriotique rwandais (FPR) ? L’emballage habile et attrayant de nobles revendications (retour des réfugiés, démocratie, partage du pouvoir, droits de l’homme) qui se virent bien accueillies en 1990 par la communauté internationale, dont la Belgique, et par l’opposition interne, a servi à cacher ses véritables intentions : attirer tout le pouvoir à lui et le sécuriser d’une main de fer, donner libre cours aux ambitions interventionnistes au Congo… ». »

En le lisant, il y a lieu de soutenir que  »les véritables intentions » de celui qui a orchestré cette grande tragédie ont été cachées pendant très longtemps ; qu’il n’était pas seul, qu’il a bénéficié de certains soutiens et pas les moindres. L’ex-ambassadeur Belge est optimiste. Pour lui, ces intentions cachées vont finir par être toutes révélées au grand jour. Il note que  »la recherche de la vérité progresse malgré tout ».

En effet, les lecteurs de plusieurs livres et articles écrits sur cette grande tragédie pourraient partager cet avis et affirmer même que  »la recherche de la vérité » a déjà fait des pas de géant. Pour illutrer cela, je cite deux derniers livres et un article très récents :  »Rwanda. L’éloge du sang » de Judi Rever (2020) (Rwanda. L’éloge du sang – INGETA ),  »Do not disturb  » de Michela Wrong (2021) (The Dark Underside of Rwanda’s Model Public Image – The New York Times (nytimes.com) ) et  »Le Rwanda est, depuis 1990, un laboratoire des Maîtres du monde » (Le Rwanda est, depuis 1990, un laboratoire des Maîtres du Monde – Echos d’Afrique du 08 avril 2021 )

Les Rwandais et les Kongolais attachés à la lecture et à l’écriture sont au courant des pas de géant déjà effectués par  »la recherche de la vérité » sur la grande tragédie des Grands Lacs Africains. Ils se mobilisent. Ils se mettent debout et luttent pour que la justice leur soit rendue tout en étant pas naïfs. Ils se mobilisent pour renverser, à moyen et long terme, les rapports de force. Plusieurs sont tentés par le revisitation des relations géostratégiques. Ils luttent contre toutes sortes d’approches complaisantes au sujet de cette grande tragédie. Tel est le contexte dans lequel, un Français, Patrick de Saint-Exupéry pourrait être traduit en justice par un groupe de Kongolais pour  »négationnisme ». (RDC: des personnalités dénoncent le « négationnisme » d’un livre de Patrick de Saint-Exupéry — La Libre Afrique )

Parmi eux, certains font partie de l’ONG dénommée  » Conscience Congolaise pour la Paix » travaillant depuis plusieurs mois pour que les recommandations faites par le Rapport Mapping sur les 617 crimes commis dans les Grands Lacs Africains et plus particulièrement au Kongo-Kinshasa soient mises en pratique.

Les pas de géant effectués par les Kongolais  »éveillés » dans  »la recherche de la vérité » sur les ambitions interventionnistes de Kagame et des  »Maîtres du monde » au Kongo-Kinshasa devraient les convaincre de la nécessité de la mise sur pied, dans les brefs délais, d’un leadership collectif patriote, soucieux de la souveraineté du pays, porteur d’un projet collectif de société ayant la sécurité, la justice, la stabilité, la tranquillité et la paix comme marqueurs d’un Etat (maître de ses fonctions régaliennes) à refonder au cœur de l’Afrique à court, à moyen et à long terme. La sécurité et la stabilité devraient être portées par  »une culture souveraine » promotrice de la cohésion nationale, luttant contre  »l’imbécilisation »et  »la mendicité » collectives et par une armée républicaine  »professionnelle ».

 »Les Kongolais éveillés » devraient lire, relire et mettre en pratique ces paroles de Lumumba : « Nous ne sommes pas seuls. L’Afrique, l’Asie et les peuples libres et libérés de tous les coins du monde se trouveront toujours aux côtés de millions de congolais qui n’abandonneront la lutte que le jour où il n’y aura plus de colonisateurs et leurs mercenaires dans notre pays. A mes enfants que je laisse, et que peut-être je ne reverrai plus, je veux qu’on dise que l’avenir du Congo est beau et qu’il attend d’eux, comme il attend de chaque Congolais, d’accomplir la tâche sacrée de la reconstruction de notre indépendance et de notre souveraineté, car sans dignité il n’y a pas de liberté, sans justice il n’y a pas de dignité, et sans indépendance il n’y a pas d’hommes libres. »

Non.  »Les Kongolais éveillés » ne sont pas seuls. Certains peuples d’Afrique, d’Asie, d’Amérique du Sud et d’Europe se mettent de plus en plus ensemble pour  »reconstruire leur indépendance et leur souveraineté » dans un monde qu’ils veulent multipolaire ( Lire « Les États-Unis sont de retour » se heurte à une réalité multipolaire (reseauinternational.net)) . Il y a lieu de leur emboîter le pas dans un grand respect de la charte de l’ ONU garantissant l’égalité souveraine des Etats , leur équité, la non-intervention dans les affaires internes d’un Etat tiers et le principe de la réciprocité.

 
 
 

 

Babanya Kabudi

Génération Lumumba 1961

Leave a comment

Your email address will not be published.


*