L’UDPS et Palu : la guerre de succession enclenchée

L’UDPS et Palu : la guerre de succession enclenchée

Qui succédera aux charismatiques Antoine Gizenga du Parti lumumbiste unifié (PALU) et Etienne Tshisekedi de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) ? Les deux leaders, qui ploient sous le poids de l’âge, ne se sont pas donné la peine de faciliter l’émergence des dauphins au sein de leurs partis respectifs. A ce jour, l’étau biologique se dispute le contn5le des appareils ainsi portés pendant des décennies avec les compagnons de lutte. Bien que vivantes, les deux icônes sont conjuguées déjà au passé parleurs partisans, qui se livrent une guerre sans merci.

Les deux partis historiques de la République démocratique du Congo sont entrés dans une zone de fortes turbulences.
L’UDPS et le PALU ne cessent de décliner à la suite des années accumulées dans l’activisme politique. Depuis plusieurs décennies, leurs leaders respectifs, à savoir Etienne Tshisekedi et Antoine Gizenga, ont trôné dans le microcosme politique congolais. La similitude entre les parcours de ces deux leaders classés charismatiques, donne la mesure de la santé de la démocratie à la congolaise. A scruter leurs attitudes actuelles, il faut déceler non seulement leurs emprises sur les masses, mais aussi leur refus de débarrasser le plancher pour l’émergence de ceux qui ont évolué à leur ombre.

En réalité, estime un analyste de la politique congolaise, « les présidents-fondateurs des partis en RDC son prêts à tout, à condition que tout se fasse suivant leurs intérêts ». Notre interlocuteur poursuit : « Même s’il faut que le parti fasse naufrage, ce n’est pas leur problème tant ce qui se fait n’est pas à leur profit ».

L’on n’est pas loin de cette analyse au regard du comportement d’Etienne Tshisekedi et d’Antoine Gizenga. Leur mérite est d’avoir, pendant les deux époques qui ont marqué l’histoire du pays, à savoir la colonisation et la dictature, bravé l’oppression. Avec un peu de recul, l’on se rend à l’évidence que ce leadership charismatique s’est imposé de soi. Il n’est ni idéologique encore moins démocratique.

LE GOUROU OMNIPRESENT

La suite devient claire comme l’eau de roche. Antoine Gizenga Fundji, patriarche du Palu, est sous la brèche depuis la veille de l’indépendance en 1960. Vice-Premier ministre dans le premier gouvernement de Patrice-Emery Lumumba, il a connu l’exil puis a occupé les fonctions de Premier ministre à l’issue des élections générales de 2006.

De son propre aveu, il a reconnu que l’esprit peut demeurer alerte, mais le corps ne suit plus après avoir travaillé et lutté durant des années.

Deux ans auront suffi pour qu’Antoine Gizenga présente sa démission, s’avouant vaincu par l’usure. En revanche, et fort curieusement, il n’a pas voulu lâcher les rênes du parti. Autrement dit, il considère le Palu comme sa propriété, « son » bien ou encore, « son » entreprise.

La nomination d’un secrétaire permanent du Palu n’a rien changé quant au détenteur de l’essentiel et du réel pouvoir. Le mythe a fait d’Antoine Gizenga un démiurge. Et pourtant, du fait de son âge avancé, toute la lucidité et la perspicacité dans les réactions ont baissé d’intensité.

L’illusion de trôner, une tentation toujours actuelle. Au point que le noyau familial, mêlé pour des raisons évidentes à la direction du parti, politique, se croit en droit de poursuivre l’œuvre du patriarche. « C’est notre affaire », entend-on dire les ayants droite.

Raison pour laquelle, les compagnons de lutte ne sont pas en reste. Ils tentent de se mettre, eux aussi, dans la posture de reprendre le flambeau. Qu’est-ce à dire ? Qu’ils n’avaient pas compris le sens de la lutte ainsi que les limites démocratiques de leur leader charismatique? Difficile à dire. Toutefois, le mythe est en train de tomber. Conscient, le bouclier familial s’est déployé, sans ménagement, produisant des casses.

Au fond le soubassement de tous ces remous qui secouent le Palu n’est rien d’autre que la guerre que de potentiels successeurs se livrent pour prendre la place du timonier. Ils s’insurgent contre un leadership démocratique qui ferait du débat libre et indépendant, le mode de fonctionnement du parti. Y prétendre, revient à détruire l’aura du leader charismatique et, par conséquent, s’attirer la fatwa.

LE SPHINX ÉTERNEL

C’est pareil à l’UDPS où on ne peut mettre en doute les oukases du sphinx estampillés du sceau de l’infaillibilité. Les fondateurs de l’UDPS se sont imposés auprès des Congolais pour avoir plus fort de sa gloire. L’aura conféré par la lutte a eu le mérite de mystifier ces « dignes et braves » fils du pays. Le simple fait de s’opposer à la toute puissance de Mobutu, qui se considérait comme dieu, conférait la même qualité à ces califes en politique. Ils ignorent cependant que ce pouvoir est temporel et limité dans l’espace.

Au parti de Limete, le pouvoir est personnifié à travers un individu, inviolable, infaillible et sans doute immortel. Toutes les structures ne peuvent fonctionner qu’autour de sa personne voire de ses humeurs. Le collaborateur qui parvient à saisir la fibre sensible, est propulsé. Dans ces conditions, le cercle familial se transforme en un force capable de précéder les événements voire de les conduire au gré de leurs propres intérêts. Cette dynamique a eu raison de nombre de collaborateurs qui ont été contraints de quitter le navire.

Ce qui ne signifie pas que des traitres à la solde du dictateur n’avaient pas été évincés suffisamment à temps pour ne point nuire à l’idéal à atteindre. Faustin Birindwa et autres avaient traversé avec armes, bagages et stratégies pour se mettre au service du pouvoir finissant de l’époque. Plutôt que de constituer la solution, cette trahison avait davantage renforcé le leadership de Tshisekedi non seulement dans l’UDPS, mais aussi sur l’ensemble des fortes acquises au changement. Ses pairs de 1’UDPS ont dû quitter le navire poussé par la détermination des combattants à ne tolérer aucune compromission avec le dictateur.

Tshisekedi l’avait compris tôt En phase avec cette ligne, il a su canaliser l’opinion en sa faveur, conduire le combat de main de maître au point que personne ne pouvait résister à ses mots d’ordre. Cet investissement avait eu des conséquences fâcheuses sur ses proches engagés, eux aussi, dans le même combat, à divers degrés.
Au fil des ans, des clans se sont créés autour du mythe dont l’ancrage sociologique et politique dans la population ne laisse planer aucun doute sur le mariage scellé avec le souverain primaire. Jusqu’à ce jour, il est difficile de casser dans l’imaginaire des Congolais l’espoir démocratique porté par le sphinx de Limete.

Curieusement, au sein de I’UDPS, aucun dauphin n’a émergé du lot de ceux qui sont passés par cette école. Pire, dans toutes les formations politiques, ce sont les anciens de 1’UDPS qui tiennent le haut de la liste. Etaient-ils étouffés par le charisme du lider maximo? On serait tenté de répondre par l’affirmative. Pour preuve, les fissures qui se constatent sur l’édifice chaque fois que « Ya Tshitshi » tombe malade.

Le discours officiellement tenu par le secrétaire général Bruno Mavungu et son adjoint Tshibala va dans le sens de soutenir que le président Tshisekedi reste la seule personne capable de porter avec succès l’étendard de l’UDPS actuellement. Aucune vision pour la succession n’est annoncée en public.

Dans le même lot, Valentin Mubake, tout en étant en froid avec les précités, ne jure que par Tshisekedi : « Même sur un lit, Tshisekedi est l’unique candidat de l’UDPS à la présidentielle de 2016».

En même temps, une contestation rampante puis publique de la montée en puissance de Félix Tshisekedi, le fils du président, laisse transparaître les lignes des divisions. L’on soupçonne le cercle biologique de vouloir écarter les autres de l’héritage politique. La fronde de 25 fédérations de l’extérieur du pays procède de cette logique qui voudrait priver Félix Tshisekedi du droit de prétendre à la succession par le simple du fait de sa filiation à Etienne Tshisekedi. Très vite, l’on a oublié que ce dernier a exercé les fonctions d secrétaire national en charge des relations extérieures.

Que ce soit A 1’UDPS ou au Palu, la démocratie se décline u gré des humeurs et intérêts des leaders charismatiques. A leur disparition, ces deux partis connaîtront le sort du Mouvement populaire de la révolution (MPR) qui a sombré avec la chute puis la mort de son fondateur. Le parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) tire-t-il les leçons de ces partis aînés ? That’s the question.

LE POTENTIEL

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