Tuer  des jeunes prêts au sacrifice suprême à Kananga et ailleurs

Tuer à Kananga, à Beni, à Kimpese, à Kinshasa, à Tshimbulu et ailleurs au Congo-Kinshasa, c’est pour  »le réseau d’élite transnational de prédation » une façon d’étouffer toute revendication  de justice sociale et de respect de la vie. Y souscrire, c’est renoncer aux profits mirobolants que procure la guerre raciste de prédation et de basse intensité commencée depuis les années 1990.

Il est rare que les massacres des adeptes du chef coutumier Kamwina Nsapu poussent ceux qui les commentent à réentendre le discours déclencheur de leur lutte. Ayant un problème permanent de mémoire collective, plusieurs d’entre nous se limitent à ce qu’ils voient , à ce qui se passent sur terrain actuellement, sans déployer un effort pour remonter le temps. Si les méthodes auxquelles ces  »jeunes enfants » recourent avec leurs armes factices peuvent être remises en question,  la lutte pour la survie qu’ils mènent mérite d’être questionnée en profondeur.
Au début de cette lutte, il y a un discours mobilisateur fondé sur quelques constats.  »Katshia bakulela, kuyi biebe mua kudia bimpe, kuyi biebe mua kulala ne kolota bimpe. Bakulela ne ukola, uya kusana mayi muitu ; usela uya kusuna mayi muitu ; amu nanku. Bubanji bonso bua ditunga mu bianza bia ba Rwandais, ba Ougandais, ne ba Burundais. » (Depuis que tu es né, tu n’as pas jamais eu la possibilité de bien manger, de bien dormir et  de faire de beaux rêves. De ta naissance jusqu’à l’âge adulte, tu vas toujours chercher de l’eau (loin de chez toi) en forêt. Toute la richesse du pays est accaparée par les Rwandais, les Ougandais et les Burundais.) (https://www.youtube.com/watch?v=vCp4Gg_63zY)
Bien manger, bien dormir, bien boire, bien se faire soigner, bien envoyer ses enfants à l’école grâce à une bonne justice sociale, au respect de la dignité humaine et des droits sociaux, politiques, économiques, spirituels et culturels des  citoyennes et des citoyens, en évitant que  »le réseau d’élite transnational de prédation » ne détourne les terres et les richesses du pays à son seul profit, telles sont les revendications que plusieurs mouvements patriotes  et résistants congolais portent  et expriment de temps en temps au travers des stratégies et des méthodes critiquables.
Plusieurs de ces mouvements en arrivent à choisir la violence comme mode d’action après avoir constaté que  »le réseau d’élite » en question ne comprend que le langage de la violence. Il y en a qui, finalement, se rendent compte de  »l’impuissance de la puissance ». A ce moment-là, il y en a qui acceptent la reconversion en partis politiques  »mercenaires », en milices du  »réseau » ou en simples citoyens. Il y en a d’autres qui acceptent de poursuivre  cette lutte en étant prêts pour le sacrifice suprême.
Tuer à Kananga, à Beni, à Kimpese, à Kinshasa, à Tshimbulu et ailleurs au Congo-Kinshasa, c’est pour  »le réseau d’élite transnational de prédation » une façon d’étouffer toute revendication  de justice sociale et de respect de la vie. Y souscrire, c’est renoncer aux profits mirobolants que procure cette guerre raciste de prédation et de basse intensité commencée depuis les années 1990.
Son mode opératoire sème le trouble dans les têtes des Congolais(es). Ils (elles) en viennent à identifier certains de ses membres à un gouvernement du pays ou à l’opposition politique. Ce leurre affecte le discours et entretient une fausse idée selon laquelle le Congo-Kinshasa possède un gouvernement et une opposition pouvant l’aider à sortir du gouffre sans fond où il se retrouve actuellement. Un ex-milicien de ce  »réseau en témoigne » dans une interview commentée au bout de laquelle il croit avoir fait la guerre pour rien. Voici ce qu’il dit : « Notre pays est compliqué et souvent les groupes rebelles sont pilotés par le gouvernement, par les politiciens ou par les pays voisins. C’était le cas de ce mouvement qui avait été créé pour permettre à certains d’accéder à des hauts postes dans l’armée. Mais ça ne me dérangeait pas plus que ça, car on combattait les Rwandais et on défendait nos terres et nos villages. On était environ 1 400 hommes. On s’est battus sur cette colline que tu vois, là au-dessus de notre village. Ça tirait de partout. Moi, je vivais à la maison et je partais combattre chaque matin. Chez les Maï Maï, on se sacrifie pour la nation. Ce groupe a fini par être dissous et moi je n’ai plus rien fait pendant un an. J’ai rencontré celle qui allait devenir la mère de mes enfants. On a un peu vécu. »
(En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/02/10/dans-l-est-de-la-rdc-une-vie-de-guerres-pour-rien_5077468_3212.html#oshHBEm5T5Wg5PCz.99)
Impliqué dans cette guerre, cet ex-milicien ne semble pas identifié tous les tireurs  de ficelles . Néanmoins, il sait, de l’intérieur et des pays voisins, qui pilote les rébellions et pourquoi. Et il a du mal à comprendre qu’il nomme  »gouvernement », une partie du  »réseau d’élite de prédation » opérant  dans la région des Grands Lacs africains depuis la guerre de l’AFDL.
Il touche à la question des terres et des villages à défendre. Les brader à vil prix permet aux membres de ce  »réseau » de s’enrichir, de construire des maisons, d’infiltrer les institutions congolaises  pour les affaiblir.
Les jeunes ayant entendu et maîtrisé le discours mobilisateur Kamwina Nsapu, en leur propre langue maternelle, sont très dangereux pour ce régime. Ils deviennent aussi dangereux que les Maï Maï avant que leur groupe ne puisse être dissout. Ils comprennent que la question du Congo-Kinshasa est (aussi) celui de l’enrichissement sans cause d’un  »réseau de prédation » composé d’une infime minorité de compatriotes congolais et africains, de leurs parrains anglo-saxons et/ou asiatiques au détriment du plus grand nombre ; le 1% s’enrichit illicitement aux dépens des 90% en les assujettissant, en les abrutissant et en les dégradant.
Les jeunes adeptes de Kamwina Nsapu comme ceux de Beni Lubero ou de Kimpese ayant une bonne maîtrise de cette question sont dangereux pour  »le réseau d’élite de prédation transnational ». Ils sont et risquent de demeurer les conteurs des enjeux de  »la guerre par morceau » mené contre les Congolais(es) et plusieurs compatriotes africains de la région des Grands Lacs. L’école  et l’université ayant été mise en mal pour cette  »guerre par morceau », ces jeunes instruits par les chefs coutumiers autour du feu risquent de demeurer, demain,  »les bibliothèques vivantes » indispensables à l’entretien d’une bonne mémoire collective.  »Le réseau » s’organise donc pour les exterminer. Ils sont péjorativement qualifiés de  »milices » par  »les miliciens du réseau de prédation transnational ».
Ces jeunes prêts au sacrifice suprême viennent rappeler à nos mémoires défaillantes l’importance de restaurer  »le feu du soir » dans nos villes et villages.  »Le feu du soir » qui soit le lieu où les intellectuels organiques et structurants échangent avec les masses populaires sur les questions liées à  »la guerre par morceau » menée contre la région des Grands Lacs et le Congo-Kinshasa, sur la nécessité d’une organisation basique prenant en compte les besoins primaires des masses populaires, sur le profil des gouvernants dont le Congo de demain aura besoin, sur  »l’impuissance de la puissance » et l’importance  de l’émergence d’une Nouvelle Conscience, etc.

Babanya Kabudi
Génération Lumumba

Leave a comment

Your email address will not be published.


*