Quand JOKA devient une référence au Congo-Kinshasa…

La lecture biaisée de l’accès aux  »postes politicards » telle qu’elle est menée ces jours-ci au Congo-Kinshasa questionne notre mémoire collective  et l’inversion sémantique dans laquelle plusieurs compatriotes sont plongés. Cette inversion politique n’est pas de nature à faciliter la rupture avec la crise de légitimité dont souffre notre pays depuis l’assassinat de Lumumba.
Un petit rappel. Avant la guerre de l’AFDL soutenue par l’Ouganda et le Rwanda ayant facilité l’entrée de  »Joseph Kabila » (JOKA) au Congo-Kinshasa,  »une culture de la rue » avait conduit à la fabrication des  »Préso », des  »PDG », des  »DGA », etc.  Etre appelé  »Président »,  »PDG » ou  »DGA » procurait une grande satisfaction à plusieurs d’entre nous.  Souvent, ces dénominations étaient sans contenue. Il y avait, derrière ces dénominations, comme une valorisation  de soi dans un pays où ces postes de responsabilité étaient réservés  à une Nomenklatura tournée vers le patrimonialisme et le clientélisme.   La guerre de l’AFDL se déroule au Congo-Kinshasa dans un contexte où  »la culture de la rue » a tendance à prendre le dessus sur celle acquise à l’école et à l’université.
Un autre petit rappel. Cette  »culture de la rue » est le produit du chômage des diplômés de nos instituts supérieurs et de nos universités favorisé par l’application des programmes d’ajustement structurel du FMI. Plusieurs de ces diplômés  n’ayant pas réussi à avoir accès aux postes qu’ils enviaient sur le banc de l’école ont accepté d’être applaudis, surtout dans  »les rues de la capitale » par  »les enfants de la rue », les Shégués, sous les titres susmentionnés. Il y a eu et il y aussi  »les mêmes titres » par ces  »enfants », produits des conséquences, en grande partie, d’une certaine prédication des églises de réveil et des programmes du FMI.
Cette  »culture de la rue »  semble avoir gagné les cœurs  et les esprits de plusieurs d’entre nous au point qu’ils ont versé dans l’inversion sémantique sans poser certaines questions de fond. Là où l’ex-premier ministre rwandais Twagiramungu pose la question de savoir comment  »un ex-aide de camp » de James Kabarebe est devenu multimillionnaire, des compatriotes parlent du  »président congolais ».
Qu’est-ce que cela signifie ? Fanatiques de  »la culture de la rue », ils gomment le débat sur le parcours de  »l’ex-aide de camp » de James Kabarebe ou en retenir ce qu’ils veulent. Ils vont vous dire : « Nous savons qu’il a fait le taxi en Tanzanie. Qu’il a été aide de camp de James Kabarebe. Tout cela nous savons. Mais il est président. Il a fait la paix avec les pays voisins. Nous sommes une jeune démocratie. »  »Ce savoir » procède par  »une guerre des mémoires ». Il choisit ce qu’il veut pour coller à  » la culture de la rue » non questionnée.
Un dernier rappel. Cet  »ex-aide de camp » de James Kabarebe avait fini par être choisi comme  »Cheval de Troie »  de Paul Kagame au Congo-Kinshasa. C’est à ce titre qu’il est là. Pour réaliser sa mission de  »Cheval de Troie », il a donné, selon l’un de ses proches devenu son  »opposant », Moïse Katumbi,  »deux faux penaltys ». C’est-à-dire qu’il occupe  »sa place de Préso » sans contenu congolais grâce à la fraude, à la tricherie, à l’entretien de la violence, de la répression et de la mort. Sans cela, il apparaît  »nu ».
Malheureusement,  »la mémoire collective’ entraînée dans une lecture officielle, falsificatrice de notre histoire voudrait faire d’un  »Préso sans contenu politique congolais » celui dont dépend l’avenir politique du pays. Un monde à l’envers.
Tel est le contexte dans lequel tous les Congolais et toutes les Congolaises se mettent à rêver qu’ils (elles) peuvent tout faire à la place de tout le monde. Cette approche relève d’une lecture erronée  de notre histoire et de l’histoire d’autres peuples ayant compris l’importance de la division du travail social, culturel, politique, économique, environnemental, etc., en tenant compte, tant soit peu, des compétences.
Nous lisons plusieurs réalités de notre histoire à l’envers. Il arrive même que nous choisissions dans  »la culture de la rue  » ce qui ne nous permet pas  de  mettre JOKA devant ses responsabilités de  »Cheval de Troie ». Il arrive que  »la rue » chante  »Ooooo Ya Tshitshi ye eeeee zongisa ya na Rwanda » et que répondions à cet appel par  »un dialogue inclusif ».
Nous ne comprendrons pas grand-chose à la vie de JOKA, si si nous ne nous relevons pas de l’inversion sémantique et que nous mettons entre parenthèse ce témoignage :
« Pourtant, dix jours après la mort de son géniteur, il devient son successeur, et quatre jours plus tard il rencontre à Washington le président Bush et Pauk Kagame en marge du National Prayer Breakfast, après avoir été reçu par le président français.
L’acceptation par Joseph Kabila d’une rencontre avec Paul Kagame, l’ennemi le plus acharché de son père, fournit un indice important pour lever un pan du mystère Joseph Kabila. D’autant que l’impacte de cette rencontre est rehaussé par une décision, en date du 1er février, d’abandonner la plainte que le défunt président avait déposée devant la Cour Internationale de justice à  La Haye contre l’agression rwando-ougandaise  de la RDC, après le 2 août 1998. »

« L’affirmation suivante  du docteur Helmut Strizek me semble pertinente : « Après la mort de Laurent-Désiré Kabila, Kagame obtiendra de ses alliés américains et européens- l’intervention de l’Eufor au Congo est à situer dans  ce contexte- que le Congo soit dirigé par  »un jeune homme inoffensif », en la personne de Joseph Kabila. Ceci permettrait au Rwanda de faire main basse sur les richesses du Congo et à Kagame d’être sûr que le danger, dans la lutte contre le pouvoir dictatorial, ne viendra pas de la République Démocratique du Congo. »

Ce témoignage atteste que d’ex-aide de camp de James Kabarebe et de chauffeur de taxi en Tanzanie, JOKA est devenu,  »le garçon inoffensif » utile à Kagame et à ses parrains. Il n’est pas  »le président du Congo-Kinshasa ». Le prendre comme  »modèle d’ascension » à certains postes de responsabilité, c’est à la fois opter pour la voie de l’illégalité et l’illégitimité et partager une lecture falsifiée de notre mémoire collective. Cela peut aussi signifier la trahison de la cause congolaise. C’est-à-dire  de sa libération des forces d’occupation et de sa mise sous tutelle.

Babanya Kabudi

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