Meurtre des experts de l’ONU : Contradictions “spectaculaires” des présumés auteurs à la barre

Audience dans l'affaire meurtre experts ONU

Le tribunal militaire de garnison de Kananga (Kasaï central) a organisé une deuxième audience publique, ce jeudi 30 août 2018, après la reprise lundi dernier du procès dans l’affaire du double meurtre des experts de l’Onu, l’Américain Michael Sharp et la Suédoise Zaïda Catalan. Sur les 26 prévenus cités dans l’extrait de rôle, 14 étaient présents à l’audience qui a vu pour la première fois le tribunal militaire de garnison confronter les principaux présumés assassins.

D’abord Constantin Tshidime Bulabula, chef du village où les deux experts ont été tués, a reconnu avoir vu les experts dans son village le dimanche 12 mars 2017, entourés de plusieurs miliciens Kamuina Nsapu, avec Vincent Manga  Kabasele comme “coordonnateur” de la milice dans la région de Bunkonde et ses environs.

« Ce jour là, vers 3 heures, j’ai vu Vincent Manga muni d’un téléphone portable de couleur noire venir en courant. Il m’a dit qu’il venait de recevoir un appel téléphonique des autorités de Kananga lui annonçant la descente des blancs avec mission de brûler nos villages et que nous devrions nous préparer. Il m’a quitté. Une heure après, je l’ai revu avec deux blancs entourés de plus de soixante miliciens. Les blancs ont présenté leur ordre de mission. Après lecture par Manga, je lui ai demandé de laisser partir les blancs car ils nous aident à développer nos villages. Manga a refusé et a pris les sacs des blancs avant de les conduire à son foyer initiatique (Tshiota ). Quelques minutes plus tard, j’ai vu un  garçon de mon village, qui est aussi milicien, me rapporter que, sur ordre de Manga, les deux blancs ont été tués”, a relaté Constantin Tshidime Bulabula.

Appelé à comparaître, Vincent Manga Kabasele a tout nié.

“Je ne connaissais pas Bulabula. La première fois que je l’ai vu, c’était dans les locaux de l’Agence nationale des renseignements (ANR), à Kinshasa. Il ne me connaissait pas. Quand on l’a battu, il a fini par citer mon nom. Je pense que cela lui a été soufflé à Kinshasa”, a dit Manga aux juges.

Vincent Manga a également renié Jean Bosco Mukanda, présenté par l’auditorat comme le principal témoin de l’exécution de deux experts, même si Mukanda lui a cité les noms des membres de sa famille qui vivent à Bunkonde et qu’il dit connaître.

Quant à Constantin Tshidime Bulabula, il a accusé Jean Bosco Mukanda d’avoir été un redoutable chef milicien qui opérait sous les ordres de Manga.

“Jean Bosco Mukanda m’avait arrêté une fois sur l’ordre de Manga et voulait me décapiter. J’avais payé 35.000 FC en guise d’amende pour qu’il me laisse en vie. J’ai appris qu’il avait détourné cet argent et c’est ainsi que Manga l’avait arrêté pour le lui faire payer”, a-t-il confié.

Pour sa part, Jean Bosco Mukanda, qui n’a jamais fait l’objet d’une action en justice, a reconnu avoir infiltré les miliciens pour donner des renseignements aux autorités:

“Je m’approchais d’eux pour soutirer des renseignements que je communiquais aux autorités. Parfois, ils me prenaient pour l’un des leurs”, a  dit Mukanda parlant de sa proximité avec les miliciens.

L’audience de ce jeudi s’est déroulée en présence de l’auditeur général des FARDC, le général Timothée Mukuntu. Une forte équipe d’officiers de la Monusco était aussi présente. La prochaine audience est fixée pour le lundi 3 septembre 2018.

Sosthène Kambidi

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