Kinshasa – Washington : dangereuse escalade !

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Les relations entre Kinshasa et Washington se trouvent dans une grande zone de turbulence ces deux dernières années, suite à la position clairement affichée par le gouvernement américain exigeant une « passation civilisée de pouvoir » entre le président sortant de la RDCongo, Joseph Kabila, et son successeur à désigner dans les urnes, conformément à la Constitution. Les autorités congolaises ne cessent de déplorent ce qu’elles considèrent comme l’ingérence du pays de l’Oncle Sam dans leurs affaires internes. Ce sentiment, déjà ressenti à la lumière de l’activisme politique et diplomatique des Envoyés spéciaux des USA dans les Grands Lacs, Russ Feingold d’abord et son successeur Tom Perriello ensuite, foncièrement opposés à tout « glissement » de calendrier électoral, ne fait que s’amplifier.

En cette année 2016, Washington a commencé par annoncer des sanctions ciblées contre des responsables civils et militaires congolais fichés comme principaux obstacles au processus électoral, pour les uns, et commanditaires d’actes d’atteintes aux libertés publiques, pour d’autres, avant d’aller plus loin, en sanctionnant des officiers supérieurs de l’armée et de la police. Le général Célestin Kanyama, commandant de la police pour la ville de Kinshasa était le premier à être frappé par le gel de ses avoirs sur le territoire américain, l’interdiction de séjour aux USA et de transactions commerciales avec les citoyens américains, avant les généraux John Numbi, ancien patron de la police sans fonctions officielles depuis l’affaire de l’assassinat de Floribert Chebeya, et le général Gabriel Amisi Kumba « Tango Four » des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo).

De son côté, Kinshasa  n’a rien fait pour baisser la tension. Les Envoyés spéciaux américains dans les Grands Lacs, Russ Feingold comme son successeur Tom Perriello, ne sont pas épargnés par des critiques acerbes de Kinshasa, qui n’hésite pas à rappeler à l’administration américaine que le grand Congo n’est pas un « protectorat » d’une quelconque puissance étrangère. Dernièrement, Tom Perriello s’était fait rudement bousculer à l’aéroport international de N’Djili par un cadre de la Majorité Présidentielle, à cause de ses prises de position en rapport avec l’exigence d’un dialogue inclusif et du respect du délai constitutionnel pour l’organisation de l’élection présidentielle, une manière de s’opposer ouvertement à un troisième mandat de l’actuel Chef de l’Etat.

Bras de for avec l’Occident ou recul?

 Il se remarque, depuis un certain temps, la montée d’un front commun de l’Occident contre Kinshasa. Le processus électoral congolais et spécialement son point concernant l’élection présidentielle préoccupe non seulement les Etats-Unis d’Amérique seuls, mais aussi le Canada, la France, la Belgique, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Suisse… qui parlent désormais d’une seule voix, à savoir l’observation, par Joseph Kabila, de la disposition constitutionnelle lui interdisant de postuler pour un troisième mandat. A la limite, l’Occident est prêt à lui concéder un court « glissement ».

On peut noter que c’est à l’unisson que les Occidentaux ont condamné les violences des journées du 19 et 20 septembre 2016 à Kinshasa, pointant un doigt accusateur sur les forces de l’ordre et de sécurité, qu’ils rendent responsables des tueries et pillages, réclamant au passage une enquête indépendante et des poursuites judiciaires aussi bien contre les « exécutants » que les « donneurs d’ordre ».

A ce sujet, la Haut Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme a accusé les éléments de l’armée et de la police nationale à avoir délibérément empêché cadres et militants de l’opposition à participer à la marche pacifique destinée à protester contre la non convocation du corps électoral pour la présidentielle et fait usage de leurs armes pour « tuer ». De son côté, la Procureure de la CPI a menacé de se saisir du dossier des dérapages afin de faire punir les auteurs et commanditaires de graves atteintes aux droits de l’homme enregistrées à cette occasion.

Face à ce que l’on peut considérer comme des tirs croisés de la communauté internationale sur Kinshasa, le pouvoir en place semble avoir choisi la poursuite du bras de fer. Mais, à ce stade, tout porte à croire que la politique des « réponses du berger à la bergère » ne donne aucun résultat, le bloc occidental ayant visiblement opté pour le maintien de ses « leçons » de démocratie à l’intention des autorités congolaises.

D’aucuns pensent que les gouvernants congolais auraient intérêt à analyser froidement les exigences de leurs partenaires et d’adopter une attitude conséquente. En tout état de cause, la RDC ne peut se permettre de s’enliser dans l’isolement diplomatique, pour des raisons à la fois économiques, financières et surtout sécuritaires. En effet, Kinshasa ne peut ni se passer de la haute surveillance des institutions de Breton Wood pour ses projets de développement, ni des Nations Unies pour la construction d’une paix durable dans sa partie Est.

Face à ces impératifs, il lui faut lever une option qui préserve ses relations avec des partenaires qui ne demandent pas mieux que le respect des règles du jeu démocratique dans la conduite de son processus électoral.

Par KIMP

 

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