Kasaï : les vérités font-elles peur à la MP ?

L’étouffement de deux motions de défiance par une motion incidentielle, le vendredi 06 octobre 2017 au Palais du Peuple, continue de susciter des commentaires en sens divers dans les états majors politiques comme au niveau de l’homme de la rue. Les vérités sur les violences vécues par les populations kasaïennes pendant huit mois font-elles tellement peur à la Majorité Présidentielle qu’elle a préféré choisir la voie de la caporalisation des députés nationaux à celle du débat public ?
Qu’à celle ne tienne ! L’opinion interne est persuadée, dans sa large majorité, que les langues allaient se délier au point tel qu’on allait tout savoir sur la genèse de l’affaire jusqu’aux dérapages ayant entraîné plus de 5.000 morts, plus de 30.000 réfugiés en fuite en Angola et plus d’un million et demi de déplacés internes. Si le présidium de l’Assemblée Nationale avait ouvert le débat, on allait certainement remonter le fil d’Ariane, selon une expression consacrée.
C’est fort dommage, mais la « vérité » n’est que momentanément occultée. Le temps, ce complice incontournable de l’histoire, finira un jour par la restituer aux générations futures. Avant que tout finisse par se savoir, on retient au moins que les rapports de plusieurs enquêteurs des Nations Unies et des organisations non gouvernementales, tant congolaises qu’étrangères, ont déjà versé dans le domaine public un tas de données de nature à permettre de désigner des coupables présumés des crimes et leurs commanditaires. Le travail qui reste à faire, c’est la confirmation des soupçons qui pèsent lourdement sur des miliciens Kamuina Nsapu, des officiers et soldats des FARDC ainsi qu’un certain nombre de personnalités politiques, dont la plupart se recrutent au sein des institutions de la République.
            La famille politique du Chef de l’Etat a certes craché sur le droit du peuple congolais de savoir ce qui s’est réellement passé au centre du pays, entre le mois d’août 2016 et celui de mai 2017, mais la soif de connaître reste tenace. En dépit de l’interdiction de parole faite aux députés nationaux qui n’acceptaient pas la version des faits livrée jusque-là au public par les sources officielles, les interrogations demeurent au sujet de la mutation de l’espace kasaiën, connu jusque-là comme une oasis de paix, en une jungle.
            La prolifération des milices incontrôlées, dont l’origine était parfois difficile à déterminer, a créé le doute dans les esprits quant à leur connexion avec Kamuina Nsapu. Il y a sûrement des pyromanes qui se sont servis de ce label pour « brûler » le Kasaï, pour des mobiles inavoués, mais dont un lien étroit avec l’hostilité légendaire aux différents pouvoirs qui se succèdent à la tête du pays, n’est pas à exclure. Mais peut-on attendre des applaudissements de la part des populations dont le sous-sol a longtemps hébergé les diamants, qui ont fait des millionnaires dans les cercles des décideurs politiques et leurs clans, et qui assistent à leur épuisement sans avoir tiré profit de la « Révolution-comparaison » de Mobutu, ni de l’« Auto-prise en charge » de Laurent Désiré Kabila, encore moins des 5 cinq Chantiers de la République et de la « Révolution de la Modernité » ?
            Le commun des mortels aurait aimé savoir pourquoi l’espace Kasaïen a été mis à feu et à sang. Hélas, les éclairages attendus de la Représentation nationales ont été systématiquement bloqués. Ceux qui ont étouffé la vérité devraient savoir que les morts ne cesseront jamais de réclamer justice. Par conséquent, la plaie rouverte par la Majorité Présidentielle, en empêchant les députés nationaux de s’exprimer librement, risque de raviver encore les frustrations.
Kimp

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